28 AVRIL 1687 - 30 JUIN 1687
Mercure Galant - Avril 1687, pp. 185 et suiv.
J'ai poussé trop loin tout ce qui regarde l'ambassade de Siam en France pour ne pas achever en vous apprenant ce qu'il y a longtemps que vous désirez savoir, et dont il m'a été impossible d'être plus tôt informé de la manière que je le souhaitais. On peut dire que c'est la seule chose qui manquait au Journal de cette ambassade, après les quatre lettres que je vous ai écrites là-dessus, et ce que je vous ai appris dans ma dernière touchant ce qui s'est passé à Brest avant l'embarquement des ambassadeurs et dans le temps qu'ils se sont embarqués. Je vous envoie donc cette liste des présents si désirée, et dont la richesse marque la grandeur du roi. Il y a beaucoup de choses parmi le grand nombre d'articles que vous allez voir qui sont pour la princesse reine.
- Cent cinquante pièces de draps de toutes sortes de couleurs, des plus fins et des plus beaux qui se soient trouvés en Europe.
- Quatre-vingts pièces de draps d'or et de brocart d'or de différents dessins, d'une grande richesses et d'un grand prix.
- Cent fusils qui tirent chacun six coups. Ils sont d'un travail très singulier. Il y en a beaucoup dont les ornements sont d'or ; les autres sont enrichis d'argent, et la plupart ont été faits par M. Piraube (1).
- Vingt paires de pistolets dont plusieurs tirent aussi six coups, qui sont autant de chefs-d'œuvre de l'art et de la magnificence, ainsi qu'un très grand nombre d'autres armes à feu. Il y a aussi des cuirasses et d'autres ornements de guerre d'un très beau travail et d'une très grande beauté, tant à cause des divers ouvrages de ciselure que de la nouvelle manière qu'on a trouvée d'y appliquer l'or et l'argent. Le tout est garni d'une infinité de pierreries, de sorte que le travail et la richesse les rendent d'un fort grand prix.
- Douze vestes ou chemises à l'usage des Siamois, pour la princesse reine. La plupart sont de point de France (2), et toutes d'une pièce. On met des étoffes d'or ou de couleur dessous, ce qui en fait paraître le dessin. Les ouvrages dont je vous parle sont d'une beauté et d'une délicatesse si surprenante qu'on n'a jamais rien vu en Europe de ce travail qui en ait approché.
- Douze mouchoirs du même ouvrage, mais dont les dessins sont différents.
- Douze pendules faites par M. Thuret (3), entre lesquelles il y en a trois d'or, ciselées de bas-reliefs d'un très beau travail. Elles montrent le mouvement annuel et le diurne, la longueur des jours et des nuits pendant toute l'année, le lever et le coucher du soleil pour l'horizon de Siam, l'âge de la lune et la manière de compter les mois à la siamoise par lunaison, ayant deux lunes, dont l'une marque 30 jours et l'autre 29, et ainsi successivement.
- Quatre montres d'or, ou pendules émaillées de couleurs différentes.
- Deux horloges sonnantes, dont les boîtes sont enrichies de très beaux bas-reliefs. Elles sont émaillées de diverses couleurs et montrent l'âge de la lune et la manière de compter les mois à la siamoise.
- Trente-six montres d'or de diverses manières, enrichies de pierreries, avec leurs boîtes garnies de diamants et de clous d'or.
- Deux globes faits par Balthazar Martinot, horloger de la défunte reine mère du roi (4). L'un est céleste et représente le mouvement du firmament, où sont attachées les étoiles fixes de plusieurs grandeurs, posées selon leur longitude et latitude. Ces étoiles sont d'or et de relief et sont appliquées sur le globe qui est d'argent gravé. On y voit les constellations célestes par figures exactement posées. Le mouvement de ce globe est de tourner sur ses deux pôles arctique et antarctique. Le zodiaque est placé sur la ligne écliptique en la manière ordinaire, sur laquelle ligne le soleil fait son tour en un an, et ainsi il fait son ascension oblique d'un tropique en un autre tropique. Il fait connaître son lever et son coucher par toute la terre, par le moyen d'une cercle déclinant et mobile qui se met selon la hauteur des climats et des lieux où l'on s'en veut servir. Le soleil et la lune sont emportés en 24 heures avec le premier mobile au firmament, lequel fait son cours en 366 jours, et par conséquent les étoiles fixes ont leur mouvement ordinaire, et l'on y voit leur lever et coucher sur l'horizon, comme les autres planètes. La lune a son mouvement naturel qui rétrograde et se renouvelle tous les vingt-neuf jours et demi, ce qui fait connaître ses aspects au soleil et ses situations dans chaque degré des signes, par chaque jour et chaque heure. Ce globe est suspendu en l'air par le pôle arctique. Il chemine par sa pesanteur, et remonte et poussant la main par-dessous. Son premier méridien est fixe, et les heures sont posées fixes au droit de la ligne équinoxiale sur un cercle horizontal, coupé de deux cercles verticaux, à angle droit et d'un cercle oblique déclinant qui sert à connaître le passage des astres vers l'horizon. L'horloge qui est dedans peut souffrir telle agitation qu'on voudra, et aller sur la mer. Elle marque les minutes qui peuvent être utiles pour la navigation, et pour connaître les longitudes et les minutes. Le globe terrestre est d'argent sur un pied très propre où sont gravées en langue siamoise les principales parties du monde, et la division géographique fort exacte. Il y a dedans une pendule sonnante qui va huit jours, et qui fait mouvoir par l'endroit de la ligne équinoxiale un zodiaque placé en écliptique, qui est emporté en 24 heures. On y voit deux cercles d'argent. L'un porte les douze signes, et l'autre les douze mois à la manière siamoise. Le soleil est entre eux et fait son cours naturel, parcourant tous les degrés des signes de degré en degré, et faisant connaître les parties de la terre qui sont éclairées selon les saisons. À l'un des pôles qui est l'antarctique, est un cadran d'horloge qui marque encore les minutes, les heures, les jours, les mois et les lunes, de sorte que les mêmes motions se trouvent. Ce globe s'arrête comme le céleste, mais les manières de mettre en pratique sont fort différentes. C'est un travail de spéculation particulière auquel M. Martinot s'est fort appliqué, et il a outre ces deux globes trois fort belles pendules avec les heures en siamois et plusieurs fort belles montres faites par le même.
- Un sabre garni de fort beaux diamants, de grosses émeraudes, et de très beaux rubis.
- Un sabre dont la poignée est d'or massif et garnie aussi bien que le fourreau, de turquoises de la vieille roche (5) et de plus de 90 pierres d'une grosseur surprenante.
- Un autre sabre dont la poignée est aussi d'or massif, sur laquelle, aussi bien que sur le fourreau, sont enchâssées douze grosses émeraudes, divers gros diamants et beaucoup d'autres pierreries.
- Cinq miroirs de cristal de roche, dont les bordures sont très artistement travaillées, et garnies de pierreries.
- Plusieurs autres miroirs, quantité de boîtes d'or et beaucoup de poignards dont les poignées sont d'or massif et d'or de rapport (6), faits par M. Bains, fort estimé pour ces sortes d'ouvrages.
- Quatre cabinets (7), quatre écritoires d'or massif et de filigrane d'or (8), servant de toilettes, avec toutes les garnitures, qui consistent en un très grand nombre de petites boîtes d'or d'un très beau travail, enrichies de diamants et de diverses autres pierreries.
- Douze tasses à prendre du thé, du café et d'autres liqueurs, faites à l'usage des Siamois, toutes d'or. Elles sont émaillées de plusieurs couleurs et garnies de pierreries, avec leurs boîtes de filigrane d'or et de vermeil doré, et d'une très belle ciselure.
- Une couronne d'or garnie de gros diamants et de gros rubis d'Orient, avec un tour de fort grosses perles. Cette couronne est d'un travail très beau et très délicat, et les pierres en sont parfaites.
- Plusieurs petits cabinets d'ambre, avec des bas-reliefs très délicatement travaillés et des figures de même matière qui en font le couronnement.
- Deux miroirs à bordure d'ambre avec des glaces des plus grandes qui se puissent faire. On ne peut rien ajouter à la beauté des bordures, qui sont très larges. On y voit une infinité de bas-reliefs, et de figures différentes, aussi bien que divers ornements convenant à l'ambre sur lesquels ils sont ciselés, car il y en a de diverses sortes. C'est le travail de plusieurs années.
- Douze grands lustres de cristal de roche.
- Douze girandoles (9) du même cristal, et fort hautes.
- Douze tapis faits à la manufacture de Chaillot appelée Savonnerie. Il sont à fond d'or, d'un très beau dessin, et fort grands.
- Quatre tentures de tapisserie à fond d'or, de la manufacture royale des Gobelins. Elles représentent les Maisons royales et plusieurs histoires.
- Quarante-huit cartes d'une invention très rare (10), toutes dorées et enrichies d'ornements extraordinaires par les plus habiles ouvriers du royaume.
- Une très grand quantité d'instruments de mathématique, pour la navigation, pour les eaux, et pour tout ce qui concerne cette science, les uns d'or, les autres d'argent et les autres de cuivre doré. Tous ces instruments sont très bien travaillés.
- Quantité de compas de proportion.
- Plusieurs selles, housses et fourreaux de pistolet, les unes brodées d'or et les autres d'or et d'argent.
- Plusieurs brides et autres harnais garnis de pierreries.
- Une housse de cheval et une housse d'éléphant d'une très belle broderie, dont une partie du dessin est formée par un très grand nombre de pierreries.
- Plusieurs justaucorps, vestes, casaquins et baudriers à la façon des Siamois, tous délicatement brodés et semés de perles.
- Plusieurs miroirs ardents d'une construction nouvelle, et qui bien qu'ils n'aient qu'un pied de diamètre, font autant d'effet et ont autant d'activité que tous ceux qu'on a vus jusqu'à présent (11).
On peut aisément distinguer parmi ces articles les choses qui conviennent à la princesse reine, comme des chemises de point, des montres, des pendules, des miroirs, des écritoires, des cassettes, des cabinets et généralement tout ce qui regarde les toilettes, soit pour l'usage, soit pour l'ornement.
Comme M. Constance est catholique, il y a une très belle chapelle pour lui avec quantité d'autres présents qui lui conviennent. Il y a aussi un habit du roi pour le même M. Constance, accompagné de tout ce qui regarde le reste de l'habillement. Il avait témoigné aux ambassadeurs avant leur départ, qu'il souhaitait avec passion avoir un des habits de ce prince. Tous ces présents sont accompagnés de plusieurs autres, au nom de Mgr le Dauphin et de Mme la Dauphine.
Je vous ai marqué la manière galante dont Monsieur a fait des présents quelque temps avant le départ des ambassadeurs.
Un jeune prince qui n'est pas moins estimé par son esprit que par la grandeur de sa naissance a fait aussi un présent très considérable au roi de Siam (12). C'est un grand livre où toutes les conquêtes du roi, depuis le commencement de son règne, sont peintes sur du vélin, et vis-à-vis de chaque tableau, qui représente ou la prise d'une place, ou le gain d'une bataille, ou quelque action éclatante et guerrière ; l'histoire de ce tableau est écrite et toute renfermée dans la page. Il y a une autre page blanche qu'on a laissée pour y mettre la traduction que l'on en doit faire en siamois.
Présents de Sa Majesté aux ambassadeurs.
- Plusieurs portraits du roi, d'or émaillé, et garnis de diamants.
- Plusieurs chaînes d'or avec la médaille de Sa Majesté.
- Six lustres de cristal de roche à chacun des trois ambassadeurs.
- Plusieurs pièces de draps fin, de diverses couleurs.
- Plusieurs pièces de draps d'or et de brocart d'or.
- Plusieurs fusils, pistolets et autres armes, très riches et très curieuses. Une infinité d'autres présents à leur usage, comme des sabres et des poignards garnis d'or.
- Des tasses à prendre du thé et du café.
- Des cartes, des compas et des machines de toutes sortes, pour les cieux, pour la navigation, pour les fortifications, et pour divers autres arts.
- Trois cabinets de cristal de roche taillé à facettes, un peu plus grands que des cassettes ordinaires, mais beaucoup plus élevés. Ils sont entourés de colonnes de vermeil doré de divers ordres d'architecture, et de plusieurs autres ornements. Les dedans sont d'une très belle gravure, parce que la ciselure y aurait incommodé. Ces cabinets, quoique carrés longs (13), ont des couvercles élevés qui les font paraître à demi en dômes, et ne s'ouvrent que par le dessus.
- Plusieurs tables de marbre de diverses couleurs et de diverses manières.
- M. de Croissy et M. de Seignelay ont aussi envoyé de très beaux présents à M. Constance, qui leur en avait envoyés de Siam. Parmi ceux qui sont partis, il y a des miroirs d'une grandeur et d'une beauté surprenante.
- Plusieurs vases, buires, bassins et bocaux de vermeil doré, dont la ciselure est très belle. Il y a aussi plusieurs ouvrages des manufactures de France, et de tout ce qui s'y fait de plus rare et de plus beau.
Présents des jésuites au roi de Siam.
- Deux grandes machines, l'une pour les planètes et l'autre pour les éclipses. J'en ai donné la description, et celle de leurs effets dans ma lettre de Siam où je parle de l'observatoire. On a ajouté à cette machine un mouvement d'horloge qui donne de soi-même tous les jours la situation des planètes dans le ciel, et ne laisse pas de faire connaître le passé et l'avenir, par l'état présent des planètes dans le ciel, comme on faisait aux machines qui ont précédé celle-ci.
- Un globe suspendu allant par son propre poids.
- Vingt-quatre très belles horloges allant sur un plan incliné.
- Quatre grandes pendules, façonnées comme celles de l'Observatoire.
- Quatre autres portatives.
- Un mouvement qu'on nommé parallactique, pour servir à observer avec de grands verres sans tuyaux, et plusieurs autres instruments de mathématique et d'astrologie.
- Des montres qui peuvent se remonter sans qu'on s'en aperçoive, et sans qu'on sache qu'on les remonte, et qui se trouvent remontées pourvu qu'on les ouvre seulement une fois le jour pour voir l'heure. Quand on les ouvre plus souvent, on ne les remonte qu'à proportion du temps qu'on a été sans les ouvrir.
Tous ces ouvrages ont été faits par M. Thuret, dont le génie est admirable pour ces sortes de choses, et qui n'est pas moins connu et estimé chez les étrangers qu'il l'est en France. Ils feront connaître aux peuple d'Orient que les Beaux Arts fleurissent beaucoup plus en ce royaume qu'à la Chine et au Japon, et les Indiens, qui croient surpasser en richesses tous les peuples de la terre, verront par les présents du roi sortis de la seule Cour de France, que les Indes n'en fournissent pas autant à toutes les autres nations pendant des siècles entiers. La plupart de tous ces ouvrages ont été vus chez M. Alvarez (14), qui a conduit particulièrement ceux qui sont enrichis de pierreries, dont il a fourni un fort grand nombre. Son activité a fait voir son zèle. Il a tout fait mettre dans des caisses de plomb, scellées avec d'autre plomb, de sorte que tout ce que ces caisses renferme est impénétrable à l'air de la mer.
De Paris, le 3 mai 1687 (p. 256).
Le 15 du mois dernier, on baptisa ici dans l'église de Saint-Sulpice dix jeunes Siamois, deux desquels avaient été amenés en France par les mandarins qui y vinrent en l'année 1685 (15), et les huit autres furent laissés en cette ville par les ambassadeurs du roi de Siam, pour y apprendre quelques arts. Ils avaient été instruits dans le séminaire des Missions Étrangères par un ecclésiastique de leur nation qui a été élevé à Siam dans le séminaire. Un autre, qui apprend la conduite des eaux, a été baptisé avec un jeune Turc dans l'église de la paroisse de Versailles, et tenu sur les fonts, au nom du roi et de Mme la Dauphine.
Mercure Galant - Mai 1687, pp. 3 et suiv.
(…) Les Siamois ont appris à connaître les lettres de l'alphabet avant que de pénétrer la profondeur des sciences, et les plus grands pécheurs, et ceux même qui n'ont connu le vrai dieu que longtemps après qu'ils sont venus au monde, l'on prêché aux idolâtres et leur ont fait part des lumières de la foi. Quand on a porté ces lumières chez les nations qui n'étaient point éclairées, on y a fait d'abord si peu de progrès qu'il semblait que l'ardeur des plus zélés pour le salut de ces peuples devait demeurer infructueux. Cependant le temps qui amène tout, pourvu qu'on ait la constance de ne se point relâcher, a fait convertir des villes et des provinces entières. C'est, Madame, ce qui nous doit faire espérer des fruits beaucoup plus considérables des grandes choses que le roi a faites et qu'il exécute encore tous les jours, afin que les progrès de la mission de Siam s'augmentent. On ne voit plus que temples élevés à la gloire du vrai dieu dans ce pays où l'idolâtrie régnait seule avant que les missionnaires y eussent été reçus (16) et ce qui marque le bien que le roi fait à la religion chrétienne en soutenant cette mission, c'est que ce puissant État se trouvant rempli de peuples d'un très grand nombre de nations différentes, la religion y fait tous les jours d'autant plus de fruit que ceux qui se convertissent annoncent ensuite l'Évangile dans les lieux de leur naissance. Les Siamois mêmes qui embrassent la religion catholique font de grands progrès sur ceux de leur nation, et l'ecclésiastique de Siam dont je vous ai parlé plusieurs fois, et surtout lorsqu'il soutint en Sorbonne (17), étant demeuré à Paris dans le séminaire des Missions Étrangères, a instruit à la foi catholique deux Siamois qui avaient été amenés en France par les mandarins qui y vinrent en l'an 1685, et huit autres que les ambassadeurs qui viennent de s'en retourner y ont laissés pour se perfectionner dans les arts que le roi de Siam a jugé qui lui pourraient être les plus utiles. Le même ecclésiastique a encore instruit un Siamois qui apprend la conduite des eaux à Versailles, et ils ont tous reçu le baptême (18). Il y a sujet de croire qu'ayant été convertis par un ecclésiastique de leur nation, lorsqu'ils seront retournés en leur pays, ils y répandront les lumières qu'ils ont reçues, à l'imitation de celui dont ils les tiennent. Ce qu'il y a de remarquable, et qui doit faire espérer beaucoup pour l'avancement de la religion chrétienne, c'est que les ambassadeurs de Siam, avant que de quitter la France, ont permis aux Siamois qu'ils y ont laissés de se faire baptiser, en cas qu'ils s'y sentissent portés. Il ne faut point de raisonnement pour faire connaître que la considération qu'ils ont pour le roi les a obligés à leur donner ce consentement. (…)
Mercure Galant - Mai 1687, pp. 51 et suiv.
Quoique la liste que je vous ai envoyée le mois passé des présents qui sont partis pour Siam vous ait paru très belle, très ample et très curieuse, j'ai encore beaucoup de choses nouvelles à vous apprendre sur le même article. Il faut de grands soins et d'exactes recherches pour être pleinement instruit d'un détail pareil à celui-là, et surtout quand on veut non seulement être informé du nombre des pièces, mais donner aussi une description particulière de chacune. C'est ce que je vais faire à l'égard de celles dont je ne vous ai parlé que légèrement. Je ne vous dirai plus rien des autres, et passerai même par-dessus, sans vous les nommer une seconde fois, à cause que je vous les ai amplement décrites, mais aussi j'en ajouterai un très grand nombre dont je ne vous ai encore rien dit, et vous décrirai jusqu'aux étoffes, sans quoi il serait impossible d'en bien faire voir la richesse et de connaître en quoi consiste la magnificence de ces présents. Je commencerai par ceux que Sa Majesté a envoyés.
- Une couronne d'or à fleurons, enrichie de diamants, de rubis, d'émeraudes et de perles.
- Un grand panache d'or couvert des mêmes perles.
- Un grand miroir de cristal garni d'or, la bordure enrichie de diamants, le derrière aussi d'or à fleurs de relief et émaillées.
- Une selle de cheval avec sa housse, les fourreaux de pistolets et les harnais en broderie de relief, et les étriers de vermeil, le tout enrichi de pierreries.
- Quatre vestes de velours, deux noires et deux rouges, une de chaque couleur avec des manches, et une sans manches, en broderie de fleurs de soie, liserées d'or, enrichies de perles ; les noires avec un galon rouge, et les rouges avec un galon vert, brodées et enrichies de même suivant les modèles apportés de Siam.
- Deux baudriers en broderie d'or, passée avec les garnitures d'or émaillées.
- Un buffle (19) tout bordé d'or de relief avec les manches, le ceinturon, les crochets et les agrafes de vermeil, doré deux fois.
- Un grand vase d'ambre gravé de bas-reliefs avec sa garniture d'or.
- Un grand cabinet de cristal de roche, les garnitures travaillées à fleurs de vermeil doré.
- Une paire d'armes de fer (20) à l'épreuve du pistolet, moitié couleur d'eau et moitié gravées de plusieurs ornements dorés, complètes à l'exception des jambes, le tout doublé de satin bleu et galonné d'or.
- Deux grands fusils à la siamoise, enrichis de beaucoup de reliefs, la garniture d'argent aussi en relief, les canons enrichis d'or et d'argent, et les bois avec des ornements très riches, chacun dans son étui de maroquin rouge doré au feu.
- Quatre pièces de drap d'or et de brocart d'or et d'argent, de la manufacture de M. Charlier à Saint-Maur (21), sur des dessins de France, savoir :
- Une pièce de drap d'or rayé, à fond d'argent broché d'or et d'argent, nué de plusieurs couleurs.
- Une pièce de brocart d'or à fond couleur de feu, broché d'or et d'argent, liseré de vert.
- Une pièce de brocart d'or à fond vert, broché d'or et d'argent retors, liseré de couleur de feu.
- Une pièce de brocart d'or à fond violet cramoisi broché d'or et d'argent, liseré de vert.
- Six pièces d'étoffes à fleurs nuées, liserées d'or sur des dessins de Siam, savoir :
- Une pièce à fond d'or nué glacé.
- Une autre pièce à fond ponceau (22) à fleurs liserées d'or.
- Une pièce à fond pastel.
- Une autre à fond bleu.
- Une autre à fond noir.
- Et une autre à fond gris clair.
- 8 pièces de drap et de brocart or et argent très riches, sur des dessins de France, savoir :
- Une pièce de brocart très riche à fond d'or broché et à fleurs ciselées d'or rebrodé de toutes couleurs.
- Une pièce ponceau or et argent passé d'or tors (23) à travers, et rebrodé d'argent tors.
- Une pièce or et argent nué à fond noir rebrochée d'or glacé et d'or tors avec soie, ponceau brodé.
- Une pièce d'étoffe vert et or passé d'or à travers, et rebrochée d'or tors.
- Une pièce ponceau et or broché d'or glacé, et rebrodé d'or tors au petit métier.
- Une pièce cramoisi et or broché d'or lissé avec or tors, et rebrochée d'argent frisé.
- Une pièce bleue or et argent, le fond d'or broché et tors avec argent tors.
- Une pièce bleue et or passé d'or glacé à travers.
- Huit tables de marbre avec les châssis et pieds de sculpture tous dorés.
Présent de Monseigneur (24) au roi de Siam.
- Une grande pendule à quatre cristaux de roche et quatre colonnes surmontées de quatre fleurs de lys, et soutenues de quatre boules, le tout de cristal de roche, les portiques garnis d'or, enrichis de pierreries, et le dôme d'acier bruni, enrichi de feuillages d'or, terminé par une fleur de lys.
- Deux baudriers en broderie d'or, avec les garnitures d'or émaillées.
- Deux fusils à la siamoise enrichis de reliefs gravés en taille douce, la garniture d'argent, le canon damasquiné d'or, et le bois enrichi d'argent de rapport, chacun dans son étui de maroquin rouge, doré au feu.
- Une pièce d'un carré-long doré deux fois, contenant un tiroir et une boîte couverte, sur laquelle il y a une écritoire ornée de reliefs et de gravures enrichies d'or et de festons d'émail, avec 39 diamants.
- Une montre à boîte d'or à deux cristaux, dont le jonc est gravé de bas-reliefs, marquant le lever et le coucher du soleil, faisant voir le mouvement annuel et le diurne, avec le mouvement de la lune, suivant la manière de compte à la siamoise. Cette montre a son étui fleuronné d'or.
- Deux pièces de drap or et argent, de M. Charlier, sur des dessins de France, savoir :
- Une pièce de drap d'or rayé, à fond d'or et d'argent retors, avec des compartiments couleur de feu.
- Une pièce de brocart d'or à fond bleu, broché d'or et d'argent retors, liseré de couleur de feu.
- Deux autres pièces de brocart or et argent, très riches, savoir :
- Une pièce ponceau et or broché d'or, à fond glacé d'or à filigrane.
- Une autre pièce vert et or et argent, à fond d'or ciselé, broché d'or tors, avec filigrane d'or tors.
- Cinq pièces d'étoffes d'or et d'argent, nuées et liserées d'or sur des dessins de Siam, savoir :
- Une pièce à fond d'argent glacé, nué.
- Une pièce à fond amarante nué.
- Une pièce à fond isabelle.
- Une pièce à fond vert.
- Et une à fond céladon.
- Un très beau cabinet de cristal de roche garni de vermeil doré.
- Quarante-huit tables de marbre avec leurs châssis, et pieds de sculpture dorés.
Présents de Mme la Dauphine pour la princesse de Siam, nommée la Princesse reine.
- Quatre grandes roses de diamants.
- Une autre plus grande, aussi de diamants.
- Une grande rose de belles et fortes émeraudes et de diamants.
- Un miroir de cristal de roche garni d'or, la bordure et le derrière à feuillages ciselés, enrichie de diamants et de rubis.
- Un petit coffre d'or garni de vases en forme de cave aussi d'or, le tout gravé et garni de diamants.
- Deux boîtes d'or couvertes en pointes émaillées à fleurs de neuf pouces.
- Deux autres boîtes aussi d'or de même grandeur, et de même figure.
- Deux grandes tasses d'or émaillées.
- Un grand miroir d'or couvert en forme de boîte, tout émaillé à deux glaces.
- Un grand cabinet d'ambre à bas-relief et à gravures, le dessus portant plusieurs figures et personnages et arbres.
- Un très beau et grand cabinet de cristal de roche garni de vermeil.
- Une montre à boîte d'or à deux cristaux, plus grande que les autres, qui montre l'âge de la lune à la manière siamoise, avec son étui garni de fleurons ayant la boîte ciselée et cadrans d'or.
- Une autre montre émaillée de vert à taille d'épargne.
- Cinq pièces de drap et brocart or et argent très riches sur les dessins de France, savoir :
- Une pièce à fond d'argent nué au petit métier de toutes couleurs, et rebrochée d'or tors.
- Une pièce vert et or et argent, rebrochée d'or tors avec des broderies d'argent.
- Une pièce ponceau à fleurs d'or rebrochée d'un peu d'argent avec or tors.
- Une pièce bleue or et argent passée d'or en filigrane et broché d'argent.
- Une pièce de damas à fond amarante, les fleurs brochées d'or, avec des nonpareilles de satin vert.
- Une grande cassette de marqueterie et de bois de rapport des plus précieux avec son pied, toutes les garnitures dorées et d'un très beau travail.
Présents du roi à M. Constance.
- Une grande boîte à portrait de Sa Majesté avec l'attache, le tout garni de diamants.
- Un sabre tout d'or avec un revers de quatre pouces de large à la siamoise, tout le fourreau garni de pierreries.
- Une montre d'or émaillée de rouge à taille d'épargne (25) avec son étui, ouvrage de M. Thuret.
- Une autre montre d'or, le jonc ciselé avec son étui, garni de feuillages d'or.
- Une autre montre d'or émaillée de vert à taille d'épargne or et blanc, avec l'étui à clous fleuronnés d'or.
- Un fusil enrichi de relief, le canon damasquiné d'or fort riche, et cannelé de deux manières, avec son étui de maroquin rouge doré au feu.
- Un autre fusil enrichi de reliefs, le canon cannelé à gouttières, enrichi d'or de rapport, le bois orné d'argent de rapport, la garniture avec des bas-reliefs et d'or de rapport aussi avec son étui.
- Un autre fusil enrichi de gravure, le canon et la culasse damasquinés d'or, avec son étui.
- Un autre fusil, la platine unie, le canon ayant un masque de relief, aussi avec son étui.
- Une paire de pistolets enrichis de reliefs, garnis d'or de rapport, avec leurs étuis de maroquin rouge doré au feu.
- Une autre paire de pistolets enrichis de gravures en taille douce, le canon damasquiné d'or, le bois orné d'argent de rapport, avec son étui de maroquin.
- Une autre paire montés d'ivoire avec des têtes de lion, l'ouvrage du canon gravé de taille douce.
- Deux très beaux lustres de cristal à branches de fontes dorées, enrichies de festons, de boules et de fleurs de cristal de roche.
- Une tenture de tapisserie de Flandre, représentant l'histoire de Diane.
- Un coffret d'ambre travaillé à bas-reliefs et gravés.
- Une manière de chapelle aussi d'ambre avec un crucifix, le tout ayant de très beaux ornements.
- Six pièces d'étoffe de soie or et argent sur des dessins de France, savoir :
- Une pièce à fond vert très riche.
- Une pièce incarnat or et argent.
- Une pièce bleue or et argent.
- Une autre bleue or et ponceau.
- Une pièce de cramoisi tout or.
- Et une pièce de ponceau et or rayé.
- Sept pièces de drap très fin d'écarlate, vert, violet, bleu, gris de perle et de cannelle contenant 106 aunes.
- Une pièce de camelot couleur de feu à pur poil de 28 aunes ¼.
- Deux selles magnifiques de l'écurie de Sa Majesté avec leurs housses, le tout en broderie d'or avec tous les harnais dorés, l'une brodée sur un velours rouge, l'enharnachement et têtière dorée et fourreaux de pistolets ; et l'autre brodée sur un velours vert, tout l'enharnachement doré, et les fourreaux de pistolets.
Présents du roi pour le premier ambassadeur.
- Une boîte à portrait de Sa Majesté avec l'attache toute garnie de diamants.
- Un sabre d'or à la turque, la garde et le fourreau tous garnis de grosses turquoises de vieille roche, et de rubis.
- Un très beau lustre de cristal de roche à dix branches de fonte dorée enrichies de consoles de cristaux qui supportent un vase garni de fleurs, jetant des cristaux autour, le dessous garni d'une campane de boules de cristaux avec une grosse pièce taillée dans le milieu.
- Une tenture de tapisserie de Flandre à personnages et verdures, représentant les muses et autres parties de la métamorphose.
- Un fusil enrichi de reliefs, la garniture et porte-vis relevés d'or, le canon orné d'or et d'argent de rapport.
- Un fusil à deux coups ayant le canon damasquiné d'or.
- Un autre fusil enrichi de gravures en taille douce.
- Un autre fusil enrichi aussi de gravures, ayant quelques filets d'argent autour de la visière de couche.
- Une paire de pistolets enrichis de reliefs, le canon enrichi d'or et d'argent de rapport, et la garniture de même travail.
- Une autre paire de pistolets enrichis de gravures en taille douce, le canon damasquiné d'or en couleur d'eau.
- Une autre paire de pistolets enrichis de gravures en taille douce, le porte-vis de reliefs et un masque sur les culottes (26).
- Une grande pendule carrée allant quinze jours, sonnant les heures et les demi-heures, et la boîte de marqueterie avec des colonnes, bases et chapiteaux Corinthe à fonds d'écaille de tortue et son étui garni de cuir.
- Une petite pendule d'or de poche, la boîte enrichie de gravure avec son étui garni de clous d'or à feuillages.
- Une montre d'or d'émail en miniature, le dessous de la boîte représentant Mars avec Vénus et l'Amour, le jonc et le dedans de paysages avec personnages.
- Huit pièces d'étoffes de soie or et argent sur les dessins de France, savoir :
- Une pièce de brocart violet tout or, en broderie d'or glacé et tors.
- Une pièce bleue or et argent à fond de Damas en broderie d'or, reciselée d'argent tors.
- Une pièce ponceau et or glacé et rebrochée d'or tors.
- Une pièce bleue or et argent par arabesques d'or glacé, et rebrochée d'argent tors.
- Une pièce amarante vert et or, avec raies de satin broché d'or lissé et tors.
- Une pièce ponceau tout argent par chamarrures d'argent lissé et broché d'argent tors.
- Une pièce blanc et or nué en Damas avec soie ponceau et broché d'or.
- Et une pièce vert et or en gros-de-Naples (27) par chamarrures.
- Quinze pièces de draps très fins d'écarlate vert, violet, bleu, gris de perles contenant 245 aunes.
- Deux pièces de camelot couleur de feu contenant 55 aunes ½.
Présents du roi pour le second ambassadeur.
- Un lustre de cristaux de roche à dix branches de fonte dorée, ayant une couronne enrichie de plusieurs cristaux de roche et de Milan, le dessous garni de campanes (28) de boules et pièces de cristaux de Milan, avec une grosse poire taillée en côte au milieu.
- Une pendule allant quinze jours, sonnant les heures et les demi-heures, la boîte en forme de cartouche sur un fond de cuivre doré, les ornements aussi dorés d'or moulu.
- Une grande montre d'or couverte d'émail en miniature, le dessous de la boîte représentant l'enlèvement d'Europe, et le dessus représentant une Vénus et des amours avec des tritons sur un dauphin, et le dedans de paysages et personnages.
- Une montre carrée à feuillage d'or, ciselés avec un cristal de roche.
- Une tenture de tapisserie de Flandre représentant des jeux d'enfants.
- Un fusil enrichi de reliefs relevés d'or, le canon de reliefs, le fond d'or, et le bouton d'or de rapport.
- Un autre fusil enrichi d'une garniture d'argent gravée en taille douce et d'argent de rapport autour de la visière de couche.
- Un autre fusil orné de gravures en taille douce.
- Un autre fusil, le canon gravé de plusieurs ornements en taille douce avec du relief sur la visière de couche.
- Une paire de pistolets enrichis de reliefs, la garniture et les canons de rapport.
- Une autre paire de pistolets enrichis de gravures en taille douce, et d'argent de rapport sur le bois.
- Une autre paire de pistolets de gravure en taille douce, les canons cannelés et le bois orné d'argent de rapport.
- Huit pièces d'étoffe d'or et d'argent sur des dessins de France, savoir :
- Une pièce pourpre or et argent, par chamarrures d'or glacé, rebrodé d'or tors à filigrane d'argent.
- Une pièce de brocart d'or et d'argent, ponceau par chamarrures d'or luisant et broché d'or.
- Une pièce couleur de café, argent et nué au petit métier, rebrochée de deux argents avec des couleurs.
- Une pièce amarante et argent changeant, broché d'argent.
- Une pièce vert, or et argent, fond de Naples, avec filigrane de soie.
- Une pièce, ponceau vert et argent en gros de Naples changeant par bandes nouvelles.
- Une pièce cramoisi et or, à fond de satin brodé de soie noire.
- Et une pièce bleue, or et argent par tissu en chaîne.
- Quinze pièces de draps très fins, d'écarlate, vert, violet, bleu, gris de perle et de cannelle, contenant 233 aunes ¾.
- Une pièce de camelot de 29 aunes ½.
Présents du roi pour le troisième ambassadeur.
- Une pendule allant quinze jours, sonnant les heures et les demies, la boîte de fond d'écaille de tortue, de marqueterie, faite en dôme, des pilastres, des chapiteaux et bases d'ordre ionique, les ornements dorés d'or moulu.
- Une montre d'or émaillée de peintures en miniature, le dessous représentant deux amants avec l'Amour, et au-dessus les mêmes amants sans l'Amour, le dedans de paysages et personnages.
- Une autre montre d'or émaillée de vert de taille d'épargne.
- Un fusil enrichi de reliefs, le canon damasquiné d'or et émaillé.
- Un autre fusil enrichi de beaucoup d'ornements gravés en taille douce.
- Un autre fusil aussi de gravures en taille douce, le canon damasquiné.
- Un autre fusil orné de gravures en taille douce.
- Un autre fusil ayant les mêmes ornements.
- Une paire de pistolets enrichis de gravures en taille douce, le canon damasquiné d'or et en couleur d'eau, le bois enrichi de feuillages d'argent de rapport.
- Une autre paire de pistolets de gravure en taille douce, avec quelques reliefs.
- Une autre paire gravée aussi en taille douce, les porte-vis de relief.
- Une tenture de tapisserie de Flandre, de verdure avec de petits personnages et animaux.
- Deux grandes girandoles à six branches de fonte dorée, chacune enrichie de plusieurs étoiles de cristaux de roche taillés, et plusieurs autres pièces aussi de cristaux.
- Sept pièces d'étoffe de soie or et argent, sur les dessins de France, savoir :
- Une pièce, bleu et or très riche, avec or glacé et broché d'or.
- Une pièce de cassé et argent nué, riche et brodé de deux argents de couleur à mosaïque.
- Une pièce, ponceau, or et argent, par galons d'or et d'argent brochés.
- Une pièce, couleur de chair et argent, à fond gros-de-Naples nué de soie verte.
- Une pièce, bleu et or avec ponceau, à fond gros-de-Naples en tissu.
- Une pièce, amarante et or, gros-de-Naples et satin en tissu.
- Et une pièce, rouge et vert, changeant en chaîne.
- Sept pièces de draps très fins d'écarlate, vert, violet, bleu et gris de perle, contenant 85 aunes ¾.
Présents de M. le duc du Maine à M. Constance.
- Un très grand lustre, tout de cristal de roche à douze branches de fonte dorée, ayant une couronne enrichie de plusieurs boules de cristaux de roche, garni d'une très belle campane de cristaux, ayant une grosse boule de cristal de roche taillée dans le milieu.
- Deux pièces d'étoffe or et argent très riches, sur des dessins de France.
- Une très belle pendule sonnant les heures et les demi-heures, et allant huit jours.
- Deux coupes, deux verres, une soucoupe, une aiguière, deux bouteilles, un baril, et une tasse de cristal de roche ciselé, avec une cassette aussi de cristal, remplie d'éventails de miniature et de ceintures or et argent, avec un portrait en miniature de M. le duc du Maine.
- Un grand livre représentant les conquêtes du roi, en miniature, avec les personnages et les places au naturel, et le plan des places, le tout sur du vélin, avec une description historique. Ce livre est couvert de chagrin avec des garnitures et des plaques d'or d'un ouvrage ciselé. Les armes du roi sont au milieu, et il y a des chiffres aux coins. Je vous avais déjà dit une partie des choses qui sont contenues dans cet article, mais je ne vous avais pas mandé le nom du prince qui faisait ce présent (29).
Présents de M. le marquis de Louvois à M. Constance.
- Six grandes tables de marbre jaspé ovales.
- Un très riche tapis de la savonnerie.
Présents de M. le marquis de Croissy à M. Constance.
- Un grand miroir avec sa bordure de glace à fond de lapis, les ornements aussi de lapis, et le chapiteau d'un pareil travail.
- Douze corbeilles de cristal taillé.
- Deux grands bassins d'argent doré en ovale, relevés au fond en bosse ronde de plusieurs figures représentant l'histoire de Scipion, de Marc-Antoine et de Cléopâtre.
- Un grand bassin où sont rapportées plusieurs plaques d'argent doré, au fond duquel relevé en demi-bosse est un Neptune dans un char tiré par quatre chevaux marins.
- Un très beau vase en forme de fontaine, ayant deux bassins en coquille d'argent doré, l'un soutenu d'un Atlas monté sur un char d'argent doré, l'autre élevé au-dessus et soutenu d'une Vénus d'argent, accompagnée d'un cygne aussi d'argent sur une coquille d'or. Au sommet du vase est un Mercure d'argent. Toutes ces figures jettent artificiellement de l'eau.
- Un grand crucifix d'ambre très curieux.
- Une grande cassette de cristal taillé et enchâssé, entrelacé de roses de diamants avec des feuillages d'or trait, d'une belle symétrie, dans laquelle cassette il y a douze paires de gants glacés.
- Un éventail de peau de senteur, où est peint en miniature le carrousel dernier fait en France, les bâtons enrichis d'or parsemés de perles et de diamants fins, tenant ensemble par une vis d'or.
- Sept autres éventails de différentes couleurs et représentations, ornés de rubans or et argent.
- Une cassette de cristal, avec sa bordure aussi de cristal tortillé, dans laquelle il y a une paire de bracelets et corail taillé, avec une boucle de diamants fins à chacun.
- Une montre d'or avec sa boîte émaillée, garnie de diamants fins, la clé enrichie de diamants.
- Une tabatière d'or émaillée, garnie de rubis, avec un plus gros rubis pour la fermer.
- Un beau chapelet de corail.
- Un autre de corail uni.
- Un chapelet d'ambre très précieux.
- Un très beau cordon de corail.
- Une cave couverte de satin vert, ornée de galons et de clous d'argent, contenant douze flacons de cristal couverts d'argent, remplis d'essences et de différentes bonnes odeurs.
- Vingt-quatre paires de gants d'Espagne, garnis de rubans de diverses couleurs.
- Deux grandes peaux d'Espagne, d'une senteur merveilleuse.
- Une très belle coupe d'émail avec sa couverture, sur laquelle sont représentées diverses batailles, et un étui de satin rouge galonné d'or.
- Un verre de cristal de roche couvert, figuré avec son pied d'argent et son étui de satin rouge.
- Un grand verre et coupe, aussi de cristal de roche, figuré, avec sa couverture et son étui de satin rouge galonné d'argent.
- Une cave de satin rouge, contenant six grands gobelets de cristal gravé.
- Une autre cave aussi de satin rouge, contenant cinq grands gobelets de cristal figuré.
Présents de M. le marquis de Seignelay à M. Constance.
- Deux grands miroirs de figure octogone, avec leurs bordures toutes de cristal.
- Un bénitier de cristal de roche garni d'argent.
- Quatre grandes tables de marbre, avec leurs châssis et pieds de sculpture tous dorés.
- Une tenture de tapisserie à fond vert.
- Une grande figure de marbre, représentant deux enfants qui tiennent un pied de vase.
- Cinquante portraits des principales personnes de la Cour, avec leurs bordures dorées.
- Un grand fusil de marqueterie fait en Canada, d'un ouvrage exquis, avec son étui de maroquin rouge, fleurdelisé d'or.
- Une paire de pistolets montés d'ivoire, tirant chacun deux coups, avec quelques gravures en taille douce.
- Trois grandes caisses remplies de différents ouvrages de cristaux d'Allemagne.
- Un grand verre avec son pied de vermeil doré.
- Une grande soucoupe aussi de cristal avec son pied de vermeil doré.
- Un grand globe de verre, représentant le labyrinthe de Versailles.
- Un très beau cabinet d'optique, représentant plusieurs belles vues.
- Un tableau représentant Versailles, avec son cadre doré.
- Deux tableaux de rocailles, avec leurs cadres aussi dorés.
Mercure Galant - Juin 1687, pp. 245 et suiv.
Je sais que vous avez grande impatience de savoir ce qui s'est passé à Siam depuis que M. le chevalier de Chaumont en est parti. Vous n'êtes pas la seule qui ayez marqué de la curiosité là-dessus, mais les nouvelles qui viennent de 6 000 lieues sont rares, et l'on n'en reçoit pas aussi souvent qu'on voudrait. Je vais pourtant vous en dire quelques-unes, ce sont les seules qui soient venues de ce pays-là depuis le retour de M. le chevalier de Chaumont.
Vous savez que le roi de Siam, ayant une estime toute particulière pour Sa Majesté et pour toute la nation française, souhaita d'avoir à son service quelques officiers français de distinction, et pria M. le chevalier de Chaumont de lui laisser, sous le bon plaisir du roi, M. le chevalier de Forbin, dans le dessein d'en faire son grand amiral, parce qu'il avait déjà fait beaucoup de campagnes sur les vaisseaux de Sa Majesté dont il était officier. M. le chevalier de Chaumont crut que le roi approuverait ce qu'il ferait là-dessus, et y donna son consentement. Il fut suivi de celui de M. le chevalier de Forbin, qui demeura à Siam. Il ne s'y trouva pas seulement utile pour commander sur mer, mais encore pour discipliner les troupes de terre, et leur faire faire l'exercice à la manière de France. Un jour qu'il le faisait faire à une compagnie de Portugais et à une de Mores du roi de Siam, elles se chagrinèrent de ce qu'il leur fît connaître qu'elles s'en acquittaient mal et se soulevèrent contre lui. Ce n'était qu'un prétexte pour faire éclater une conspiration qu'elles avaient faite contre sa personne et contre M. Constance. Ces deux compagnies avaient même formé le dessein de piller les palais de ce dernier, et de s'emparer de tous ses effets (30). M. Constance en fut averti, et armé de sa seule fermeté, soutenue de celle de M. le chevalier de Forbin, il alla au-devant de ces mutins, fit saisir les plus coupables, dissipa le reste, et fit avorter leur entreprise (31). Cette action justifie tout ce que les relations ont dit à la gloire de M. Constance et fait voir que les Français sont partout Français, c'est-à-dire intrépides, et que ce n'est pas seulement en France qu'ils font connaître l'intelligence qu'ils ont dans le métier de la guerre, lorsqu'ils ont pris une fois le parti des armes. Si toutes les circonstances de cette révolte, dont j'ai lieu de croire que le fond est très véritable, ne sont pas entièrement conformes à la manière dont l'action s'est passée, songez qu'il est fort difficile d'avoir des éclaircissements de si loin. Cependant si ceux à qui les avis en sont venus m'apprennent quelque chose de nouveau sur cet article, je vous en ferai part le mois prochain, soit en augmentant, soit en diminuant les particularités de cette nouvelle.
Vous vous souvenez d'un ecclésiastique siamois qui a été élevé dans la Mission à Siam. Je vous en ai parlé plusieurs fois, surtout lorsqu'il soutint en Sorbonne, du temps que les ambassadeurs du roi de Siam étaient en France (32). On l'avait mis dans la Mission Étrangère de Paris, d'où sortent les missionnaires pour Siam. Le Pape a été informé de son mérite, et ayant su le progrès qu'il avait fait dans la théologie, ce qui peut être fort avantageux à la religion chrétienne, parce qu'il pourra beaucoup mieux qu'un autre persuader ceux de sa nation, Sa Sainteté a voulu le voir, et il est parti pour Rome. Comme les talent qu'il a ne peuvent manquer à se faire connaître en peu de temps, dans un lieu où les esprits sont si éclairés, il y a sujet de croire qu'on verra un jour un Siamois élevé aux premières dignités de l'Église.
NOTES
1 - Bertrand Piraube, armurier, était logé par brevet du roi dans la Galerie Galerie du Louvre, logements réservés aux illustres, artistes, artisans et savants de renom. C'est abusivement qu'il était qualifié d'armurier, la corporation des armuriers-heaumiers regroupait les artisans qui fabriquaient uniquement des armures, des casques et des heaumes. Ceux qui fabriquaient de petites armes à feu, telles que les arquebuses, les fusils, les mousquets, les pistolets, etc., appartenaient à la corporation des arquebusiers. Voir Savary des Bruslons, Dictionnaire universel de commerce, 1726, I, p. 151 et 153. ⇑
2 - Le Point de France désignait une école de dentelle française de la fin XVIIe siècle, créée par Jean-Baptiste Colbert, ministre de Louis XIV, dans le but de freiner l’extravagance vestimentaire causée par l’achat de dentelles étrangères. Colbert fit venir des ouvriers denteliers de Venise et de Flandre et les installa dans et autour des centres de fabrication de la dentelle, tels que Sedan et Alençon. En 1665, ils obtinrent un monopole de 10 ans pour produire une dentelle concurrentielle sur le plan artistique et financier avec les variétés importées. (Source : Encyclopædia Britannica).
3 - Isaac Thuret (1630-1706), horloger du roi, comme l'arquebusier Bertrand Piraube cité plus haut, faisait partie des illustres qui avaient le privilège d'être logés dans la Grande galerie du Louvre. Outre les pendules et les montres, il réalisa de nombreux appareils pour l'Académie des Sciences, qui l'avait chargé de l'entretien de ses instruments. ⇑
4 - Balthazar Martinot l'aîné (1636-1714), fils de Balthazar Martinot le vieux (1610-1697), deux des plus fameux horloger du XVIIe siècle. ⇑
5 - Turquoises tirées d'une mine ancienne. (Dictionnaire de l'Académie française, 6ème édition, 1835, p. 669). ⇑
6 - Or plaqué. ⇑
7 - Anciennement, buffet à plusieurs compartiments (Littré).
8 - Minces fils de métal, en or ou en argent, torsadés ou pas, soudés sur une plaque de métal ou entre eux et laissant des jours, des espaces vides. (Wikipédia). ⇑
9 - Candélabre ou chandelier à plusieurs branches orné de pendeloques de cristal. (Larousse).
10 - Probablement des cartes géographiques, maritimes et astronomiques. ⇑
11 - Les ambassadeurs avaient eu l'occasion de voir un grand miroir ardent lors de leur visite à l'Observatoire de Paris le 25 septembre 1687 : Après que les ambassadeurs eurent considéré ce bâtiment, dont la seule vue en dehors ne fait pas connaître toutes les choses auxquelles il est utile, ils entrèrent dans la première salle, et passèrent de là dans la tour orientale, où ils virent divers instruments pour observer les astres, et admirèrent les prodigieux effets d'un grand miroir ardent de cinq pieds de diamètre qui fut exposé au soleil. Le feu prit à une barre de bois de plusieurs pouces d'épaisseur aussitôt qu'elle lui fut présentée, et le plomb fondit dans l'instant même qu'il fut exposé à son foyer. (Mercure Galant, édition de Lyon, novembre 1687 pp. 42-43). ⇑
12 - Donneau de Visé révélera le nom du donateur dans le Mercure de mai 1687. Il s'agissait de Louis-Auguste de Bourbon (1670-1736), duc du Maine, fils adultérin de Louis XIV et de Mme de Montespan, surnommé Gambillard au cause du pied-bot qui l'obligeait à boitiller. ⇑
13 - Le carré long était l'ancien nom du rectangle. ⇑
14 - Louis Alvarez, qui se titrait baron de Coursan, était un très riche banquier, traitant et fournisseur, qui avait eu les charges de joaillier du roi et de trésorier des Cent-Suisses. (A. M. de Boislile : Mémoires des intendants sur l'état des généralités dressés [sic] pour l'instruction du duc de Bourgogne, 1881, note 9 p. 245). ⇑
15 - C'est à la mi-octobre 1684 que le missionnaire Bénigne Vachet et les envoyés siamois arrivèrent en France. Le Mercure Galant commet la même erreur. ⇑
16 - Le lyrisme de Donneau de Visé était contredit par les faits. Les missionnaires eux-mêmes reconnaissaient que la tentative d'évangélisation du Siam fut un échec complet, et qu'ils ne réussirent guère à baptiser que quelques nouveaux-nés et quelques mourants. Le père Tachard écrivait en conclusion de la relation de son premier voyage : Il est surprenant que l'Évangile fasse si peu de progrès parmi des peuples qu'on cultive avec beaucoup de zèle et de soin, qui voient tous les jours la majesté de nos cérémonies, qui n'ont d'ailleurs aucun vice capable de les dégoûter de nos maximes et qui estiment tant les talapoins parce qu'ils font profession d'une vie austère. Cela pourrait faire croire qu'ils ont quelque chose de sauvage et de grossier, si les manières agréables et les belles réponses des ambassadeurs qui sont en France ne faisaient voir qu'ils ont de l'esprit et de la politesse. (Voyage de Siam des pères jésuites, 1686, pp. 422-423). ⇑
17 - Antonio Pinto, dit Monsieur Antoine. Voir page précédente note 10. ⇑
18 - Ces baptêmes furent célébrés le 15 avril 1687. Dans une lettre adressée à Nicolas Charmot, missionnaire au Siam, le directeur du séminaire des Missions Étrangères, Louis Tiberge, relate cette cérémonie, et donne les noms chrétiens qui furent donnés aux Siamois (il indique qu'ils étaient douze, mais n'en cite que onze) : Pi fut nommé Pierre-Emmanuel, Ppet Jean-Baptiste, Oman, Paul-Artus, Chun, Louis, Gaye, orfèvre émailleur, François-Xavier, Mi, Henri-Olivier, Duan, architecte, Philippe, Sac, François (en hommage à François Pallu, décédé trois ans plus tôt), Thean, Thomas, et Voum, Nicolas. Un dernier Siamois, malade, ne put recevoir le baptême ce jour-là. Louis Tiberge conclut ainsi sa lettre : Vous ne sauriez croire combien ils sont contents depuis le baptême, et combien ils marquent de piété dans leurs prières, surtout à la messe où ils assistent tous ensemble avec beaucoup de modestie et de récollection apparente. Ils me demandèrent des chapelets au retour de Saint-Sulpice. Je leur en fis acheter ; ils les reçurent avec respect, et ils les portèrent sur leur col comme un collier de l'Ordre de Jésus et Marie. Ils mangèrent avec nous à la première table, et ils m'ont demandé ce matin de servir tour à tour, pendant la semaine qu'ils seront parmi nous ; mais je leur ai répondu que tant qu'ils auraient leur habit baptismal, je les ferai servir par d'autres, en partie par respect pour leur innocence et leur nouvelle dignité de chrétien, et en partie par propreté pour ne pas gâter la blancheur de leur robe. (Launay, Histoire de la Mission de Siam, 1920, I, pp. 188-189). ⇑
19 - Justaucorps de buffle que portaient les gens de guerre en guise de cuirasse. (Littré). ⇑
20 - Armures de fer. ⇑
21 - Cette manufacture abrite aujourd'hui le lycée privé Teilhard-de-Chardin. L'édifice accueillait, au XVIIe siècle, la fameuse « Manufacture du ras d'or de Saint-Maur », fabrique de tissus dirigée par Marcelin Charlier. Ce dernier est appelé à Paris par Colbert en 1658. Il devient fournisseur de Louis XIV en 1673, et installe sa manufacture à Saint-Maur en 1677. Plusieurs centaines d'ouvriers y fabriquaient un somptueux tissu de velours « ras », brodé d'or et d'argent filé, en directe concurrence avec les draps italiens. Beaucoup de draperies de Versailles ont été tissées ici. La manufacture reçoit même en 1700 la visite du Dauphin. (Wikipédia). ⇑
22 - De la couleur du coquelicot, un rouge vif et foncé. ⇑
23 - De fils d'or torsadés. ⇑
24 - Titre donné à Louis de France, le Grand Dauphin, fils de Louis XIV et de Marie-Thérèse d'Autriche. ⇑
25 - Terme de gravure. Taille d'épargne, taille en épargne, sorte de taille qui se fait lorsque, enlevant le fond, les traits qui doivent paraître sont ceux qu'on épargne, qu'on laisse en relief. (Littré). ⇑
26 - La culotte d'un pistolet, le morceau de métal rond et creux qu'on attache au bout de la poignée d'un pistolet. (Littré). ⇑
27 - Gros-de-Tours et Gros-de-Naples (Manufacture en soie) : étoffe de soie, dont la chaîne et la trame sont plus fortes qu’au taffetas. La différence du gros-de-Tours & du gros-de-Naples consiste en ce que la trame et la chaîne de celui-ci sont encore plus fortes qu’au gros-de-Tours, ce qui lui donne un grain plus saillant. Il y en a d’unis, de rayés, de façonnés, de brochés en soie, et en dorure. (Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, 1757, VII, p. 953). ⇑
28 - Ornement en forme de clochette. ⇑
29 - Voir ci-dessus note 12. ⇑
30 - Selon Forbin, il s'agissait de deux compagnies de quarante hommes chacune, formées de Portugais, métis ou créoles des Indes. (Mémoires du comte de Forbin, 1729, I, pp. 139-140). À aucun moment, Forbin ne mentionne de Mores, même s'il y en avait dans les troupes de Bangkok. ⇑
31 - À cette occasion, Forbin, qui ne portait pas Phaulkon dans son cœur, fut tout de même obligé de reconnaître son courage et sa détermination : Constance paya de sa personne dans cette occasion. Il sortit du fort avec beaucoup de fermeté et sans se troubler, et allant à la rencontre des mutins qui n'étaient plus qu'à dix pas de la porte, il leur demanda d'un air de hauteur ce qu'ils prétendaient. Ils répondirent tout d'une voix qu'ils ne voulaient point du commandant français qu'on leur avait destiné. Ce ministre, qui avait pour le moins autant d'esprit que de courage, les assura que je devais, à la vérité, commander les Siamois, mais nullement les Portugais.
Cette réponse semblait les calmer lorsqu'un de la troupe, voyant d'une part ses camarades incertains de ce qu'ils avaient à faire, et de l'autre côté entendant le colonel, qui du haut du bastion leur criait de toute sa force d'obéir à M. Constance, prit la parole et mettant la main sur la garde de son épée : À quoi bon, dit-il, tant de raisonnements ? Devons-nous nous fier à ses promesses ? Constance, qui se vit au moment d'être massacré, sauta sur ce scélérat, lui ôta son épée, et, après avoir adouci ses camarades par de bonnes paroles, les renvoya chez eux. (op. cit., 1729, I, pp. 141-142). ⇑
32 - Antoine Pinto, dit Monsieur Antoine. Ses dispositions pour les langues étrangères (il en parlait quatre) avaient incité l'abbé de Lionne à le faire venir en France avec l'ambassade siamoise, surtout pour servir d'interprète. ⇑
23 mars 2019