PRÉSENTATION

Page du manuscrit de Beauchamp

En juillet 1861, alors que Napoléon III recevait à Fontainebleau les ambassadeurs du roi Rama IV (Mongkut), la revue mensuelle Le Cabinet historique publiait sous le titre Les Français à Siam, 1685-1689 une relation anonyme écrite par un officier de la garnison française qui participa, sous les ordres de Desfarges, à l'expédition siamoise de 1687-1688. Découpée en cinq parties, cette relation qui se trouve dans le tome VII de la revue, aux pages 177-190, 217-234, 262-271, 286-297, et 326-339, est ainsi présentée : Le récit que nous avons trouvé et que nous allons publier, émane d'un des officiers français venus à Siam en 1687, à la suite de Desfarges ; peut-être est-il du lieutenant même de celui-ci. Il est adressé comme compte-rendu des événements au ministre de Louis XIV. C'est un mémoire justificatif qui paraît empreint d'un grand caractère de véracité : il peint les embarras de la situation faite à la garnison de Bangkok et rectifie bien des erreurs et bien des préjugés. Il décharge complètement la responsabilité du commandant Desfarges des funestes événements qui mirent fin à l'influence française à Siam, et donne, contrairement aux récits imprimés jusqu'à ce jour, une haute idée du caractère et de l'intrépidité de Desfarges. On verra dans notre mémoire des témoignages incroyables de la férocité de ce peuple plus qu'à demi sauvage, – peu amélioré depuis ce temps, – et dont Paris a, pour le moment, l'inappréciable avantage de revoir dans ses murs les mirifiques ambassadeurs. (pp. 180-181).

Le manuscrit retranscrit par le Cabinet historique se trouve à la Bibliothèque Nationale, sous la cote : BN Ms Fr 8210. Il est présenté comme étant l'œuvre d'un certain Pinsonneau, mais le texte et les recoupements avec les autres relations et témoignages dont nous disposons laissent clairement apparaître qu'il est du major Beauchamp, un des principaux officiers de la garnison. Nous ne savons pas grand-chose de ce Beauchamp, sinon qu'il fut capitaine au régiment de la Reine, ainsi qu'en atteste un brevet de major attribué le 30 janvier 1687 (Archives Nationales, FR ANOM C127 folio 41b), et qu'il reçut un Ordre du Roi portant que M. de Beauchamp commandera dans le premier poste qui sera occupé à Siam, en l'absence de MM. Desfarges et de Verdesalle (28 février 1687) (FR ANOM C127 folio 48). Peut-être fut-il ce M. de Beauchamp, exempt des gardes du corps, fait chevalier de l'ordre de Saint-Louis en 1703, mais le nom était assez répandu et rien ne nous permet de l'affirmer.

Ce témoignage est donc d'une grande importance, puisque son auteur fut étroitement associé à la plupart des grandes péripéties qui marquèrent cette expédition. Toutefois, au regard du fiasco de l'entreprise, on gardera à l'esprit que Beauchamp, en tant qu'officier de premier plan, avait, comme Desfarges, tout intérêt à se justifier quant à certaines décisions ou certaines actions malheureuses qui ne pouvaient pas manquer d'être vivement critiquées et condamnées à son retour en France. Si Desfarges, mort en mer avant d'arriver en France, n'eut pas à répondre de ses actes, il n'en allait pas de même pour Beauchamp, l'un de ses principaux officiers.

Après le coup d'État de Phetracha, Beauchamp s'embarqua avec les débris de la garnison pour rejoindre Pondichéry sur le navire l'Oriflamme. De là, il s'embarqua sur la Normande pour rentrer en France. Ignorant que la guerre avait éclaté entre la France et les Provinces-Unies, le navire fit escale au cap de Bonne-Espérance, tenu par les Hollandais, et tous les passagers furent faits prisonniers. Beauchamp et ses compagnons d'infortune furent ensuite transférés dans la forteresse de Middelbourg, en Hollande, puis peu à peu relâchés à l'occasion d'échanges de prisonniers. On peut penser qu'il regagna la France en février ou mars 1690.

Nous avons transcrit le texte de la relation manuscrite de la Bibliothèque nationale, nous en avons modernisé l'orthographe et revu la ponctuation, et nous avons divisé l'ouvrage en quatre parties afin de faciliter le chargement des pages.

Nous avons complété cette relation par une lettre écrite le 17 novembre 1689 à la prison de Middelbourg, dans laquelle Beauchamp, s'adressant à un personnage non identifié, revient sur les événements de Siam et donnent quelques précisions qui ne figurent pas dans sa relation, ou qui la complètent.

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et de la disgrâce de M. Constance
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21 février 2019