Frontispice du 1er livre de la relation du père Tachard

 

Livre I - Début.
Voyage de Brest jusqu'au cap de Bonne-Espérance.

lettrine Page de la relation du père Tachard

EPUIS que le roi a établi l'Académie royale à Paris pour perfectionner les sciences et les arts dans son royaume (1), ceux qui la composent n'ont point trouvé de moyen plus propre à exécuter ce grand dessein que d'envoyer des hommes savants faire des observations dans les pays étrangers, afin de corriger par là les cartes géographiques, de faciliter la navigation et de perfectionner l'astronomie. Dans cette vue, quelques-uns des plus doctes de cette illustre compagnie avaient été envoyés par ordre de Sa Majesté en divers royaumes. Les uns étaient allés en Danemark, d'autres en Angleterre : on en avait envoyé à l'île de Cayenne et aux autres îles de l'Amérique, au Cap-Vert, et même sur les ports et sur les principales côtes du royaume, tandis que les autres demeurant à l'Observatoire (2) travaillaient de concert et entretenaient avec eux les correspondances nécessaires.

On cherchait l'occasion d'envoyer encore d'autres observateurs en divers endroits de l'Europe, à l'île de Fer d'où l'on prend le premier méridien (3), aux Indes orientales, et principalement à la Chine, où l'on savait que depuis 4 000 ans les arts et les sciences fleurissent, où il y a des livres sur toutes sortes de matières et des bibliothèques comparables aux plus belles de l'Europe, dans lesquelles on pourrait trouver de quoi enrichir celle du roi.

Ce défi s'était beaucoup augmenté dans les principaux membres de l'Académie depuis qu'ils avaient entretenu le père Philippe Couplet (4), jésuite flamand, qui au retour de la Chine avait passé par Paris en allant à Rome, où il était envoyé pour les affaires de la mission.

Ce père partit de Macao le 5 décembre 1681 sur un vaisseau hollandais et arriva en Hollande au mois d'octobre 1682.

M. le marquis de Louvois (5), ministre et secrétaire d'État, qui outre les affaires de la guerre et la surintendance des bâtiments du roi, était encore chargé de ce qui regarde les sciences et les arts, avait ordonné de la part de Sa Majesté à MM. de l'Académie de dresser un mémoire des choses les plus remarquables qu'on désirait savoir de la Chine, afin d'en charger le père Couplet, qui devait y retourner l'année suivante. M. le duc du Maine (6) était aussi entré dans ce dessein avec un grand zèle pour la religion, et une curiosité digne de son esprit pour les belles connaissances et beaucoup au-dessus de son âge.

Mais le roi, plus zélé que personne pour la perfection des arts et des sciences, surtout celles qui peuvent le plus contribuer en ces pays-là à l'accroissement de la religion, en faveur de laquelle il fait tous les jours de si grandes choses, touché du besoin des missions, voulut les assister de sa protection et de ses libéralités. Il avait appris du père Couplet que presque tous les jésuites français qui étaient allés à la Chine il y a plus de trente ans avec le père Alexandre de Rhodes (7) étaient morts en travaillant dans les missions de ce royaume, qu'il n'y restait plus que fort peu de missionnaires, que cependant l'empereur continuait à les protéger et qu'à son exemple les vice-rois et les gouverneurs de provinces leur étaient très favorables ; et qu'enfin on y avait un besoin extrême d'ouvriers évangéliques, tant pour cultiver les chrétiens qui y sont déjà en grand nombre que pour recueillir le fruit des espérances certaines qu'on a présentement plus que jamais d'étendre la foi dans ce vaste empire. Il avait même déjà donné une somme considérable pour y accompagner le père Couplet, et l'on ne pensait plus qu'aux moyens de les faire passer sous l'autorité de Sa Majesté, lorsque la providence divine en présenta une occasion très favorable.

À peine le père Couplet était-il parti pour Rome qu'il arriva en France deux mandarins siamois, avec un prêtre des Missions-Étrangères établies à Siam appelé M. le Vachet (8). Ils venaient de la part des ministres du roi du Siam, pour apprendre des nouvelles de l'ambassade que le roi leur maître avait envoyée à Sa Majesté avec des présents magnifiques, sur un vaisseau de la Compagnie des Indes nommé le Soleil d'Orient, qu'on disait avoir fait naufrage (9).

Sa Majesté, voyant les avances que le roi de Siam faisait pour rechercher son amitié, et que d'ailleurs on espérait que ce prince se ferait chrétien si on lui envoyait un ambassadeur, elle prit le dessein de le faire, et d'envoyer aussi par cette voie des jésuites français à la Chine, qui a grand commerce avec le royaume de Siam dont elle n'est éloignée que de cinq ou six cents lieues.

Le roi ordonne qu'on envoie six jésuites mathématiciens à la Chine.

Le roi ayant déclaré sur cela ses intentions à M. le marquis de Louvois et au révérend père de La Chaize (10), ils demandèrent d'abord à nos supérieurs au moins quatre pères qui fussent capables de travailler de concert avec MM. de l'Académie royale à la perfection des sciences et des arts, et qui s'emploieraient en même temps avec les missionnaires de la Chine à l'avancement de la religion chrétienne. Ils ajoutèrent qu'il fallait qu'ils fussent prêts à partir dans six semaines, sur le vaisseau qui devait porter l'ambassadeur de France à Siam.

Nos supérieurs n'eurent pas de peine à trouver des gens qui voulussent contribuer à l'exécution de ce dessein (11). Entre plusieurs qui s'y offrirent, on en choisit six qui se trouvèrent heureusement à Paris dans le collège de Louis-le-Grand (12) quoiqu'ils fussent de diverses provinces, comme si la providence ne les y eût assemblés qu'afin de leur procurer à tous un bonheur qu'ils souhaitaient ardemment. Celui que l'on établit supérieur fut le R.P. de Fontaney (13) , qui enseignait depuis huit ans les mathématiques en ce collège. Les cinq autres furent les pères Gerbillon, Le Comte, Visdelou, Bouvet et moi.

Leur préparation pour le départ.

Dès qu'on eut pris cette résolution, on nous avertit secrètement de nous tenir prêts à partir dans deux mois pour le plus tard. Le lendemain, nous allâmes ensemble à Montmartre (14) pour remercier Dieu, et par l'entremise de la sainte Vierge et des saints Martyrs, de la grâce qu'on venait de nous faire, et pour nous offrir à Jésus-Christ encore plus particulièrement dans ce lieu où saint Ignace et ses compagnons firent leurs premiers vœux et qu'on regarde comme le berceau de la Compagnie, qui dès sa naissance se dévoua d'une manière toute particulière aux missions étrangères. C'est pour cela que ceux qui la composent s'y sont toujours consacrés depuis, par un vœu solennel, de sorte que chaque particulier s'y croyant destiné s'y doit préparer dès sa jeunesse par tous les exercices de piété et de mortification et par l'étude des sciences et des langues qui peuvent l'y rendre plus propre, ce qui se pratique avec tant de bénédiction qu'on peut dire que ce premier esprit de l'Ordre qui lui a donné tant d'hommes apostoliques et tant de martyrs y est encore dans sa première vigueur.

Ils sont reçus dans l'Académie royale des Sciences.

Le dessein de notre voyage étant devenu public à Paris, MM. de l'Académie qui y prenaient le plus de part nous firent l'honneur de nous recevoir, par un privilège particulier, dans leur compagnie, et nous y prîmes nos places quelques jours avant notre départ. On chercha les voies les plus propres pour l'exécution des ordres de Sa Majesté, et l'on résolut qu'outre l'instruction que M. le marquis de Louvois avait fait dresser pour la donner au père Couplet lorsqu'il retournerait à la Chine, et qui nous fut remise d'abord entre les mains, les principaux membres de l'Académie nous fourniraient des mémoires particuliers touchant les remarques qu'il serait à propos de faire à la Chine, et touchant les choses qu'il faudrait envoyer en France, tant pour l'enrichissement de la bibliothèque du roi que pour la perfection des arts.

On leur donna diverses instructions pour la perfection des arts et des sciences.
Sphère armillaire avec cercle des méridiens. Petrus Apianus, 1524.

Chacun de ces messieurs se chargea de nous fournir ceux qui regardaient les sciences et les arts dont il avait une connaissance particulière, et nous eûmes là-dessus plusieurs conférences avec eux. Nous convînmes des observations astronomiques que nous ferions à la Chine et sur la route. On nous communiqua les tables des satellites de Jupiter, qui ont été faites avec tant de travail et qui servent présentement pour déterminer les longitudes. Ils nous firent aussi présent de plusieurs grands verres de lunettes d'approche de 12, 15, 18, 25, 50 et 80 pieds, dont nous en devons laisser quelques-uns à l'observatoire de Pékin (15). On nous fit encore part de plusieurs mémoires sur la physique, sur l'anatomie et sur les plantes. Il y avait dans la bibliothèque du roi des cartes marines de la route que nous devions tenir, et qui avaient servi à d'autres voyages. On nous en fit faire des copies qui nous ont été d'une fort grande utilité durant notre navigation. On nous donna de fort belles et de fort amples instructions sur la navigation, sur l'architecture et sur les autres arts, sur les livres qu'il faudrait envoyer en France et sur les remarques qu'il était à propos que nous fissions. Enfin, de tous ceux qui composent cette savante académie, il n'y en eut pas un qui ne fît paraître un zèle et une application particulière dans cette affaire, dont le succès ne devait pas peu contribuer à la gloire et à la satisfaction du roi. Tous ces mémoires examinés en plusieurs assemblées de l'Académie royale nous furent donnés avant notre départ, et ces messieurs s'étant engagés à nous faire part de leurs lumières, nous nous engageâmes réciproquement à leur envoyer nos observations, afin qu'agissant de concert et ne faisant qu'un même corps d'académiciens, les uns en France et les autres à la Chine, nous travaillassions à l'accroissement et à la perfection des sciences, sous la protection du plus grand monarque du monde.

Les divers instruments qu'ils ont portés pour leurs observations.

Cependant, nous étions fort occupés à préparer tous les instruments qui nous étaient nécessaires, et comme il fallait partir de Paris dans un mois, on fit faire durant ce temps-là deux quarts de nonante (16), l'un de 18 pouces, l'autre de 26, trois grandes pendules à secondes, un instrument pour trouver en même temps l'ascension droite et la déclinaison des étoiles, un cadran équinoxial qui marquait les heures jusqu'aux minutes et qui portait au bas une grande boussole pour trouver à toutes les heures du jour la déclinaison de l'aimant. Tous ces instruments devaient servir aux observations astronomiques.

On prit encore deux demi-cercles divisés fort exactement de six en six minutes, pour les opérations de géométrie. L'un était à pinnules (17) seulement, et l'autre à lunettes. M. le duc du Maine, quand nous allâmes prendre congé de lui, eut la bonté de nous en donner un troisième beaucoup plus grand et divisé de trois en trois minutes, qu'il avait fait faire pour son usage particulier. Nous ne saurions assez reconnaître les obligations que nous avons à ce prince de la bonté qu'il fit paraître pour nous en cette occasion.

Illustration du Voyage de Siam des pères jésuites.

Outre les machines dont j'ai parlé, nous emportions deux pendules à répétition, des miroirs ardents de 12 et de 20 pouces de diamètre, des pierres d'aimant, des microscopes, plusieurs thermomètres et baromètres, tous les tubes et toutes les machines qui servent aux expériences du vide, une horloge sur un plan incliné, les deux machines de Romer (18), dont l'une représente le mouvement des planètes, l'autre les éclipses du soleil et de la lune (19). On nous donna aussi pour notre usage plusieurs livres de la bibliothèque royale.

Pendant ce temps-là, nos pensions furent réglées par l'ordre du roi qui nous fit aussi expédier des lettres patentes, par lesquelles Sa Majesté nous établissait ses mathématiciens dans les Indes et à la Chine.

Arrivée de M. le chevalier de Chaumont à Brest.

Nous arrivâmes à Brest le 10 février, et quelques jours après, il vint des ordres de la Cour pour presser l'embarquement, parce que la saison était déjà avancée. Ils furent exécutés avec tant de diligence que toutes choses étaient presque en état lorsque M. le chevalier de Chaumont, nommé par le roi à l'ambassade de Siam, arriva à Brest. Ce gentilhomme connu dans le royaume par son mérite particulier et par la noblesse de sa Maison si ancienne et si illustre, s'était trouvé engagé par sa naissance durant ses premières années dans l'hérésie de Calvin, mais Dieu lui fit la grâce de l'en retirer avec messieurs ses frères qui se convertirent les uns après les autres en divers temps. Le dernier de tous, après avoir servi longtemps dans les armées avec toute la réputation d'un brave gentilhomme et d'un bon officier, dégoûté enfin du monde et touché du désir de travailler à son salut, entra dans notre Compagnie, où il a vécu et est mort en saint, ayant édifié tous ceux qui l'ont connu par de rares exemples de toutes sortes de vertus, et particulièrement d'une patience héroïque parmi les grandes incommodités que lui avaient causé les blessures qu'il avait autrefois reçues à la guerre. M. le chevalier de Chaumont dont nous parlons à présent était son aîné, il servit au commencement sur terre où son mérite distingué le fit connaître et aimer particulièrement du roi encore jeune. Il fut ensuite envoyé à Toulon pour y commander les gardes-marines (20) et pour les former à tous les exercices nécessaires à des gentilshommes qui doivent commander les vaisseaux de Sa Majesté. Il fut depuis fait capitaine de vaisseau et major général des armées navales du roi dans le Levant. Son zèle pour le service de son prince n'a jamais diminué en rien l'application continuelle qu'il avait au service de Dieu, et tous le regardaient avec justice comme un homme d'une sagesse et d'une piété singulière. C'est pour cela que Sa Majesté, qui se proposait principalement le bien de la religion et la conversion du roi de Siam dans l'ambassade qu'il lui voulait envoyer, choisit M. le chevalier de Chaumont pour un emploi si glorieux, persuadé que les bons exemples qu'il donnerait en ce pays-là seraient autant de preuves de la sainteté du christianisme, qui achèveraient de convaincre le roi de la vérité de notre religion.

Le roi fait envoyer des patentes de mathématiciens aux jésuites.

Le lendemain de son arrivée, nous eûmes l'honneur de le saluer dans son logis, et nous reçûmes de sa main les patentes que le roi avait eu la bonté de donner à chacun de nous en particulier, pour nous envoyer en qualité de ses mathématiciens dans les Indes et la Chine. Elles étaient signées et scellées du grand sceau de cire jaune et conçues en ces termes :

Louis par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre ;

À tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut.

Étant bien aise de contribuer de notre part à tout ce qui peut de plus en plus établir la sûreté de la navigation et perfectionner les sciences et les arts, nous avons cru que pour y parvenir plus sûrement, il était nécessaire d 'envoyer dans les Indes et à la Chine quelques personnes savantes et capables d 'y faire des observations d 'Europe : et jugeant que pour cet effet nous ne pouvions faire un meilleur choix que du père N. (21) jésuite, par la connaissance particulière que nous avons de son extraordinaire capacité. À ces causes et autres à ce nous mouvant (22), de notre grâce spéciale, pleine puissance et autorité royale, avons ledit père N. ordonné et établi, et par ces présentes signées de notre main, ordonnons et établissons notre mathématicien. Voulons qu'en cette qualité il puisse se transporter aux Indes et à la Chine pour y faire toutes les observations nécessaires pour la perfection et la curiosité des arts et des sciences, l 'exactitude de la géographie, et établir de plus en plus la sûreté de la navigation.

Si donnons en mandement à notre très cher et bien aimé fils le comte de Toulouse, amiral de France, aux vices-amiraux et lieutenants-généraux en nos armées navales, chefs d 'escadres d 'icelles, gouverneurs particuliers de nos villes et places, maires, consuls, et tous autres nos officiers, qu 'il appartiendra de donner au dit père N. toute l 'aide, faveur, assistance qui lui est nécessaire pour l 'exécution des présentes, sans permettre qu 'il lui soit donné aucun trouble ni empêchement qui puisse retarder son voyage. Car tel est notre plaisir. En témoignage de quoi, nous avons fait mettre notre scel à ces dites présentes ; prions et requérons tous rois, princes, potentats, États, républiques, nos amis, alliés et confédérés, leurs officiers et sujets de prêter audit père N. toute sorte d 'assistance et secours pour l 'exécution d 'un dessein qui regarde également l 'avantage de toutes les nations, sans souffrir qu 'il soit exigé de lui aucune chose qui soit contraire à la liberté de sa fonction, et aux usages et droits du royaume. Donné a Versailles le vingt-huitième de Janvier l 'an de grâce mil six cent quatre-vingt-cinq, et de notre règne le quarante-deuxième.

Signé Louis, et sur le replis : Colbert.

On joint au premier vaisseau une frégate.

Quoique toutes choses fussent prêtes pour l'embarquement, et le vent très bon pour le départ, il fallut néanmoins le différer jusqu'à ce que la frégate nommée la Maligne, de 30 pièces de canon, qu'on avait jointe depuis peu par ordre du roi au premier vaisseau, fût en état de nous suivre (23). Dès que la nouvelle de cet ordre arriva à Brest, elle causa tant de joie à tous ceux qui devaient faire le voyage, et fut reçue avec tant d'applaudissement, qu'on disait partout qu'après cela on ne pouvait que bien espérer de notre navigation. En effet, sans ce secours, il eût été impossible de porter les présents du roi, l'équipage de M. l'ambassadeur, celui des officiers du vaisseau et passagers, et surtout les vivres nécessaires pour un si long voyage, sans parler d'une grande quantité de ballots remplis de toutes sortes de curiosités que le roi de Siam faisait venir, tant de France que d'Angleterre (24).

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Suite du livre I
De Brest au cap de Bonne-Espérance

NOTES

1 - Cette Académie fut établie en 1666 par les soins de Jean-Baptiste Colbert : Louis XIV, après la paix des Pyrénées, désirant faire fleurir les sciences, les lettres et les arts dans son royaume, chargea M. Colbert de former une société d'hommes choisis et savants en différents genres de littérature et de science, qui s'assemblant sous la protection du roi, se communiquassent réciproquement leurs lumières et leurs progrès. M. Colbert, après avoir conféré à ce sujet avec les savants les plus illustres et les plus éclairés, résolut de former une société de personnes versées dans la physique et dans les mathématiques, auxquels seraient jointes d'autres personnes savantes dans l'histoire et dans les matières d'érudition, et d'autres enfin uniquement occupées de ce qu'on appelle plus particulièrement Belles-Lettres, c'est-à-dire de la grammaire, de l'éloquence et de la poésie. Il fut réglé que les géomètres et les physiciens de cette société s'assembleraient séparément le mercredi, et tous ensemble le samedi, dans une salle de la bibliothèque du roi, où étaient les livres de physique et de mathématique ; que les savants dans l'histoire s'assembleraient le lundi et le jeudi dans la salle des livres d'histoire ; qu'enfin la classe des Belles-Lettres s'assemblerait les mardi et vendredi, et que le premier jeudi de chaque mois toutes ces différentes classes se réuniraient ensemble, et se feraient mutuellement par leurs secrétaires un rapport de tout ce qu'elles auraient fait durant le mois précédent. (Encyclopédie de Diderot et d'Alembert). 

2 - L'Observatoire de Paris, bâti sur ordre de Louis XIV au bout du faubourg Saint-Jacques fut commencé en 1664 et achevé en 1672.

L'Observatoire de Paris. La Galerie agréable du monde. Pierre Vander Aa. 1729.

L'Observatoire est un édifice que le roi a fait commence environ l'année 1667 sur un lieu éminent à l'extrémité du faubourg de Saint-Jacques, pour servir aux observations du cours des astres et à plusieurs expériences de physique. Il a tout l'appareil et toutes les commodités que demandent ces deux belles sciences. Mais outre la magnificence de sa structure, on y voit une solidité qui la fait prendre de loin pour une citadelle. 

3 - C'est par une ordonnance du 1er juillet 1634 que Louis XIII, suivant les observations de Ptolémée, fixa le méridien d'origine à l'île de Fer, la plus occidentale des îles Canaries. Faisons inhibitions et deffenses à tous pilotes d'hidrographie, compositeurs et graveurs des cartes ou globes géographiques d'innover, changer l'ancien établissement des Méridiens. Voulons que désormais ils aient à reconnaître le dit premier méridien en l'isle de Fer comme la plus occidentale des dittes isles et compter de là le premier degré des longitudes en tirant à l'Orient sans s'arrêter aux nouvelles intentions de ceux qui l'ont placé aux Açores sur ce que ce lieu aucun navigateurs auraient rapporté l'éguille n'avoir point de variation, étant certain qu'elle n'en a point en plusieurs autres endroits qui n'ont jamais été pris pour premier méridien... Les Hollandais, pour leur part, plaçaient le méridien d'origine à Ténérife. Toutefois, à l'époque du voyage de Siam, et depuis 1667, les géographes de Louis XIV avaient déterminé un autre méridien, celui de Paris, qui peu à peu allait supplanter celui de l'île de Fer. Mais ce n'est qu'en 1792, avec l'adoption du système métrique, que le méridien de Paris remplaça officiellement celui de l'île de Fer. Et il faudra attendre la conférence internationale de Washington D.C. en 1884 pour que la France adopte le méridien de Greenwich.

ImagePlanisphère terrestre ou sont marquées les longitudes, par M. de Cassini le fils (1696). 

4 - Le jésuite Philippe Couplet (1622-1693) fit voile vers la Chine avec Ferdinand Verbiest en 1656 et y accumula une grande quantité d'informations sur les coutumes, la langue, l'histoire, la géographie et la littérature. Renvoyé en Europe pour recruter de nouveaux missionnaires, il renouvela en 1684 l'appel du père Verbiest. Il mourut noyé en mer près de Goa en 1693, lors de son voyage de retour en Chine.

ImagePhilippe Couplet. 

5 - François-Michel le Tellier, marquis de Louvois (1641-1691), fils de Michel le Tellier, ministre de la guerre, continua l'œuvre de son père et laissa à sa mort l'armée la plus puissante et la mieux organisée d'Europe. Sa carrière fut fulgurante. Surintendant des postes en 1661, ministre d'État en 1672, chargé des affaires étrangères en 1679, puis surintendant des bâtiments, des arts et manufactures en 1683. Il dirigea l'énorme chantier du château de Versailles, et fut à l'origine des dragonnades qui persécutèrent les protestants après la révocation de l'Édit de Nantes en 1685. 

6 - Louis-Auguste de Bourbon, (1670-1736), fils de Louis XIV et de la marquise de Montespan, fut légitimé et élevé au rang de duc du Maine en 1673. Il n'avait donc que 15 ans au moment de l'ambassade française au Siam. 

7 - Alexandre de Rhodes (1591-1660), missionnaire jésuite, à l'origine de la fondation des Missions Étrangères. 

8 - Bénigne Vachet (1641-1720), missionnaire qui avait accompagné en France les deux premiers ambassadeurs siamois, et subi leurs frasques, leur indolence et leur mauvaise volonté pendant tout leur séjour. 

9 - Parti de Siam le 21 décembre 1680, le Soleil d'Orient emmenait en France les premiers ambassadeurs du roi Phra Naraï. Le navire fit naufrage fin 1681 ou début 1682 au large de Madagascar. 

10 - François d'Aix de La Chaize (1624-1709), rejoignit les jésuites en 1649, et succèda au père Ferrier en 1675 en tant que confesseur de Louis XIV, fonction qu'il exerça jusqu'à sa mort. Si son influence réelle sur le roi demeure du domaine de la conjecture, on peut penser qu'il ne fut pas entièrement étranger à l'extrême dévotion dont fit preuve le souverain, ni à la décision de révocation de l'Édit de Nantes. 

11 - Le père Tachard omet de mentionner la position de Rome, absolument hostile à cet envoi de jésuites (seuls quatre étaient prévus à l'origine). Cette mission, qui apparaissait comme un coup de force de Louis XIV, avait été organisée à l'insu du Pape, qui fut mis au dernier moment devant le fait accompli et qui ne put que manifester un désaccord de principe. C'est ce qui ressort d'une Congrégation de la Propagande qui se tint à Rome le 14 février 1685 (Charles-Thomas Maillard de Tournon, Anecdotes sur l'état de la religion dans la Chine, VII, 1742, pp. 229-230) : … on a fait paraître une lettre du père de la Pallu, Provincial de France au Général, qui apprend la destination de quatre jésuites pour aller à la Chine, qui doivent partir pendant le courant du mois de février. La raison, dit-on, qui a porté Sa Majesté à cette dépense, est un ancien projet qu'on avait formé d'observer non seulement ce royaume, mais encore tous les autres endroits qui se trouveraient sur leur chemin, pour un découvrir les longitudes et les latitudes, et pour former ensuite des cartes de géographie exactes, sans oublier l'établissement de la foi catholique. Sa Majesté les a fait garnir de tout ce qui est nécessaire pour le voyage, les a fournis d'instruments de mathématiques, et chargés d'acheter les plus beaux livres chinois pour les mettre dans sa bibliothèque, dans la vue de les faire traduire. Ces pères s'embarqueront dans le vaisseau qui doit porter les mandarins du roi de Siam. Sa Majesté a voulu qu'on demandât les passeports du roi de Portugal. Comme le père Pallu prie le Général d'approuver le départ de ces quatre pères et de presser sa réponse, la saison ne permettant pas de différer, le Père Général lui a répondu le 20 de janvier dernier, donnant les mains à tout. Au reste, il n'y a point à délibérer sur un départ qui a été conçu et exécuté avec l'affectation d'un secret qu'on en a voulu faire à la sainte Congrégation, qui n'a point d'autre parti à prendre que de défendre aux quatre jésuites toutes les fonctions, à moins qu'ils ne se soumettent, comme les autres missionnaires, aux ordres du Saint Siège pour les missions d'Orient.

Et le décret pris à la suite de la discussion énonce une position sans ambiguité : Il n'est pas à propos que les quatre jésuites mathématiciens aillent à Siam ; ainsi, il leur faut défendre d'aborder à ce royaume. (Op. cit. p. 236). 

12 - Acquis par les jésuites en 1563 grâce à un legs de Guillaume du Prat, évêque de Clermont, le Collegium Societatis Jesu, autrement appelé Collège de Clermont ouvre ses portes la même année et connaît rapidement de grandes difficultés liées à la position des jésuites en France. Bénéficiant de la protection du roi à partir de 1618, le collège va acquérir une grande réputation et un immense rayonnement, couronné par le patronage officiel de Louis XIV en 1682, date à laquelle l'école prend le nom qu'elle porte encore aujourd'hui : Collegium Ludovici Magni

13 - Jean de Fontaney (ou Fontanay - 1643-1710) - Il enseigne l'astronomie au Collège de Clermont avant de s'embarquer avec l'ambassade du chevalier de Chaumont en qualité de supérieur des six jésuites mathématiciens. Ses activités de missionnaire le mèneront jusqu'en Chine où il guérit l'empereur Kang Xi d'une longue maladie. De retour en France, il occupe jusqu'à sa mort les fonctions de recteur du collège de la Flèche. 

14 - C'est sur la butte Montmartre, à Paris, qu'Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus, prononça ses vœux avec sept compagnons en 1534. 

15 - À la fin du XIIIe siècle, Marco Polo suscita la curiosité (et le scepticisme) de l'Occident en décrivant les richesses inouies du Cathay, ainsi qu'on appelait alors la Chine. Comme partout en Asie, les Portugais furent les premiers à y ouvrir des comptoirs dès le début du XVIe siècle, à Macao et à Guangzhou (Canton), suivis par les Espagnols, les Anglais et les Français.

Bien qu'on trouve des chrétiens en Chine depuis le Moyen-âge (une stèle découverte à Ch'ang-ngan (Si-ngan-fu) atteste que des Nestoriens sont entrés dans le pays au VIIe siècle), c'est dans la seconde moitié du XVIe siècle que les missionnaires de tous ordres se pressent dans l'empire. Sur les pas de François Xavier, mort en 1552 sans avoir atteint la Chine, Melchior Nunez Baretto est le premier jésuite à arriver à Canton en 1555, suivi par Matteo Ricci (1552-1610) par l'Allemand Johann Adam Schall von Bell (1591-1666), et surtout par Ferdinand Verbiest (1623-1688). La vie de ces missionnaires en Chine aura pour toile de fond les guerres entre dynasties pour le contrôle du pouvoir politique et l'interminable querelle des rites qui déchirera jésuites, dominicains et franciscains entre 1628 et 1742, pour la plus grande joie du féroce Voltaire qui verra dans ces interminables palabres les raisons du bannissement des jésuites. Pendant plus d'un siècle, en effet, on discutera pour savoir quelle traduction chinoise du mot Dieu est la meilleure et la plus adaptée, et surtout si les Chinois convertis au christianisme ont le droit de continuer à célébrer le culte des ancêtres confucianiste. Deux écoles s'affrontent chez les jésuites, celle de Matteo Ricci qui prêche la tolérance, et celle de Niccolo Longobardi (1559-1654) qui appelle à l'intransigeance. Dominicains et franciscains se rallient à Longobardi. De décrets en décrets, la querelle durera jusqu'à la bulle Ex quo singulari du 11 juillet 1742 qui se prononce définitivement contre l'autorisation pour les chrétiens de pratiquer les rites confuciasnistes. Définitivement ? Pas tout à fait. Une décision de ...1939 revient sur celle de 1742. Affaire à suivre...

La dynastie Ming au pouvoir depuis 1368 s'effrondre en 1644, et la dynastie mandchoue Qing lui succède. Ce sera d'ailleurs la dernière dynastie chinoise qui règnera jusqu'en 1911. Le premier empereur Qing, Shun Che, continue de se montrer fort tolérant envers les chrétiens, comme ses prédécesseurs Ming (Adam Schall avait été appelé à Pékin en 1630 pour prendre en main la réforme du calendrier). Les choses changent à la mort de l'empereur, alors qu'un conseil de régence prend le pouvoir en attendant que le jeune prince Khang Hi soit en âge de régner. Hostile à la religion chrétienne, et sans doute largement inspiré par un astronome musulman jaloux de la science des Occidentaux, le Conseil de régence ordonne le procès des missionnaires dominicains, franciscains et jésuites. Parmi eux, le père Adam Schall, naguère admiré et respecté, est condamné à être mis à mort, coupé en mille morceaux. Les autres sont condamnés à être fouettés et bannis. Un tremblement de terre fort opportun intervenu en 1665 réveille les terreurs superstitieuses des Chinois et permet aux accusés d'échapper à la sentence. Il sont toutefois bannis et exilés à Canton. La régence prend fin en 1666, et le tout jeune empereur Khang Hi qui accède au pouvoir s'avère être un monarque de grande valeur. La disgrâce des missionnaires prendra fin en 1671, grâce à Ferdinand Verbiest. Astronome et mathématicien de tout premier plan, il démontre les nombreuses erreurs contenues dans le calendrier lunaire officiel et devient président du Tribunal des mathématiques sous le nom de Nan Hoai Jen. Fort du prestige que lui confèrent ses succès scientifiques aux yeux de l'empereur, Verbiest demande et obtient par un décret de mars 1671 la réhabilitation de la religion chrétienne et le retour des missionnaires.

Commence alors pour les missionnaires une période de paix. Les envoyés de Louis XIV, jésuites et prêtres des Missions Étrangères peuvent se mettre à l'oeuvre dans la sérénité.

Dans le Génie du Christianisme, (1,4,c,3) Chateaubriand écrit : Le missionnaire français qui partait pour la Chine s'armait du télescope et du compas. Il paraissait à la cour de Pékin avec l'urbanité de la cour de Louis XIV et environné du cortège des sciences et des arts. Déroulant des cartes, tournant des globes, traçant des sphères, il apprenait aux mandarins étonnés et le véritable cours des astres et le véritable nom de celui qui les dirige dans leurs orbites. Il ne dissipait les erreurs de la physique que pour attaquer celles de la morale ; il replaçait dans le cœur, comme dans son véritable siège, la simplicité, qu'il bannissait de l'esprit, inspirant à la fois, par ses mœurs et son savoir, une profonde vénération pour son Dieu et une haute estime pour sa patrie.

Mais, pour le plaisir de la polémique, on ne peut passer sous silence le violent et magistral réquisitoire que Voltaire place dans la bouche du fils de Khang Hi, l'empereur Yong Zheng, qui prononcera quelques années plus tard le bannissement des jésuites : Nous ne savons que trop les maux horribles que vous avez causés au Japon. Douze religions y florissaient avec le commerce, sous les auspices d’un gouvernement sage et modéré ; une concorde fraternelle régnait entre ces douze sectes : vous parûtes, la discorde bouleversa le Japon ; le sang coula de tous côtés ; vous en fîtes autant à Siam et aux Manilles ; je dois préserver mon empire d’un fléau si dangereux. Je suis tolérant, et je vous chasse tous, parce que vous êtes intolérants. Je vous chasse, parce qu’étant divisés entre vous et vous détestant les uns les autres, vous êtes prêts d’infecter mon peuple du poison qui vous dévore. Je ne vous plongerai point dans les cachots, comme vous y faites languir en Europe ceux qui ne sont pas de votre opinion. Je suis encore plus éloigné de vous faire condamner au supplice, comme vous y envoyez en Europe ceux que vous nommez hérétiques. Nous ne soutenons point ici notre religion par des bourreaux ; nous ne disputons point avec de tels arguments. Partez ; portez ailleurs vos folies atroces, et puissiez-vous devenir sages ! Les voitures qui vous doivent conduire à Macao sont prêtes. Je vous donne des habits et de l’argent des soldats veilleront en route à votre sûreté. Je ne veux pas que le peuple vous insulte : allez, soyez dans votre Europe un témoignage de ma justice et de ma clémence.

Ils partirent ; le christianisme fut entièrement aboli à la Chine, ainsi qu’en Perse, en Tartarie, au Japon, dans l’Inde, dans la Turquie, dans toute l’Afrique: c’est grand dommage ; mais voilà ce que c’est que d’être infaillibles. (Voltaire - Relation du bannissement des jésuites de la Chine, par l'auteur du compère Matthieu - Mélange 1768).

ImageLes jésuites Matteo Ricci, Adam Schall et Ferdinand Verbiest en Chine.

Gravure de M. Humblot, extraite de la Description géographique, historique, chronologique, politique et physique de l'Empire de la Chine de Jean-Baptiste du Halde, La Haye, 1736.

ImageL'observatoire de Ferdinand Verbiest à Pékin. Astronomia Europaea. Dilingae, 1687. 

16 - Également appelé quart de cercle, le quart de nonante est un instrument de mathématique, qui est la quatrième partie d'un cercle divisé par degrés, minutes et secondes. On se sert du quart de cercle pour mesurer, et faire plusieurs autres observations de mathématique. (Dictionnaire de l'Académie française, 1694). 

17 - Les pinnules sont des petites plaques de cuivre élevées perpendiculairement à chaque extrémité d'une alidade, et percées d'un petit trou, servant à prendre des alignements. 

18 - Ole Christensen Roemer (1644-1710) Astronome danois qui détermina la vitesse de la lumière par l'observation des satellites de Jupiter. Il localisa la position de plus d'un millier d'étoiles. 

19 - Dans ses Mémoires, Bénigne Vachet ne cache pas son émerveillement sur la diversité et la magnificence des instruments dont étaient munis les six mathématiciens : En qualité de mathématiciens du roi, on leur assigna des pensions, et outre 20 000 livres que ce prince leur donna gratuitement, il voulut que ce fût à ses frais qu'on achetât tous les instruments qui leur étaient nécessaires, sans parler d'autres présents très considérables, comme des pendules, des montres, et un grand nombre d'autres curiosités, entre lesquelles il y avait deux pièces qu'on ne pouvait assez estimer. La première était une mappemonde de cuivre doré, de deux pieds et demi de diamètre, monté sur un beau pied d'argent. Le globe du ciel y était représenté avec tous les cercles de la sphère, le zodiaque et ses douze signes, les constellations bien distinctes, le firmament avec ses étoiles, les sept planètes et leurs tourbillons, et tout cela marqué par autant de pierreries de différentes couleurs et grosseur ; mais ce qui ravissait davantage, c'est que le tout était mouvant et qu'on le faisait marcher par des ressorts dont la concavité du globe était remplie ; de sorte qu'en donnant l'année, le mois, le jour et l'heure, tels qu'on voulait choisir, on voyait tous les mouvements des cieux dans la même situation qu'ils étaient à cette date ; en sorte que les éclipses du soleil, de la lune et des étoiles se faisaient avec toute la régularité que les meilleurs astronomes proposent après les avoir exactement supputées. Cette petite merveille suffisait pour trouver entrée dans les palais des plus grands princes, et par conséquent, celui qui la gouvernait aurait toujours été nécessaire.

La seconde pièce était un globe terrestre, qui avait les mêmes dimensions que la première. Entre toutes les parties du monde qui y étaient parfaitement représentées, on y voyait le flux et le reflux de la mer, et jusqu'à quel point elle montait dans l'endroit, au jour et à l'heure qu'on assignait. Il faut l'avoir vu pour le croire. (Mémoires de Bénigne Vachet, in : Launay, Histoire de la Mission de Siam, I, p. 150). 

20 - Les gardes-marine étaient de jeunes gentilshommes choisis et entretenus par le roi dans ses ports pour apprendre le service de la marine, et en faire des officiers. Ils sont par compagnies, distribuées dans les ports de Brest, de Toulon, et de Rochefort. Le roi paye des maîtres pour les instruire de tout ce qu'il est nécessaire de savoir pour faire de bons officiers ; ils en ont pour les mathématiques, le dessin, l'écriture, la fortification, la construction, l'hydrographie, la danse, l'escrime, etc. On les embarque sur les vaisseaux du roi, où ils servent comme soldats, et en font toutes les fonctions. (Encyclopédie de Diderot et d'Alembert). On notera l'importance de la danse dans la formation des officiers de l'époque. 

21 - N. majuscule avec un point s'emploie dans des actes, des récits, pour tenir la place du nom d'une personne qui est inconnue ou qu'on ne veut pas désigner, ou bien d'un nom que le lecteur devra remplacer. (Littré). 

22 - On emploie dans les dispositifs des édits du roi : À ces causes et autres considérations à ce nous mouvant. (Dictionnaire de l'Académie Française, 1694). 

23 - La Maligne était une frégate légère de 250 tonneaux et de 30 canons. Elle était commandée par M. de Joyeux d'Oléron, lieutenant de vaisseau, et avait pour lieutenants MM. du Tertre et de Saint-Villiers. 

24 - Le Mercure Galant de février 1685 (pp. 295 et suiv.) énumère une liste des présents de Louis XIV au roi de Siam :

On trouve dans L'ambassade de Siam au XVIIe siècle, d'Étienne Gallois (Paris, 1862, extrait du Moniteur Universel de juillet, août et septembre 1861, pp. 40-41) une autre version de cette liste avec quelques variantes et quelques précisions :

Bénigne Vachet, pour sa part, évoque six douzaines de chapeaux de castor, des sabres et des épées dont la garde était garnie de pierreries, et aussi une lunette de deux pieds, qui distinguait les objets de deux lieues de distance.(Mémoires de Bénigme Vachet, in : Launay, op. cit. p. 149).

Le document B2-52 intitulé Passeport pour les présents que le roi envoie au Siam, daté de Versailles le 23 janvier 1685 conservé aux Archives Nationales mentionne également 2 cravates, diverses pièces de rubans, gants et autres fournitures, ainsi que 2 caisses marquées N° A et B. La première contient 34 pots de verre de différentes formes, garnis de cuivre doré, et la seconde un petit cabinet de cristaux et de bois d'ébène, un bassin de cristaux garnis de cuivre doré avec de petites appliques d'or et 30 petites pièces de cristaux dont 13 pièces sont garnies de vermeil et le reste sans être garni.

Enfin, pour rire, on trouve aussi dans le document B4 11 folio 503 des Archives de la marine, cité par le Dictionnaire critique de biographie et d'histoire : errata et supplément Auguste Jal, Plon, 1872 pp. 671-672, un extrait du Registre des ordres du roi pour l'année 1685, signé à Versailles le 23 janvier, et qui donne passeport aux effets du chevalier de Chaumont qui allaient de Paris à Brest, port où il devait s'embarquer sur l'Oiseau. Les effets listés dans ce registre montrent ce que les gens de qualité emportaient pour voyager à cette époque, et explique pourquoi l'Oiseau et la Maligne étaient tellement surchargés :

Mémoire des hardes et meubles appartenant au sieur chevalier de Chaumont, ambassadeur pour le roi au royaume de Siam. :

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5 février 2019