II. La faune. Oiseaux – Quadrupèdes – Un animal inconnu – La licorne – L'éléphant – Le tigre.

Page de la relation de Barthélemy Bruguière

Ces bois sont remplis de gibier : il y a beaucoup d'oiseaux inconnus en Europe ; leur chant est désagréable : aucun de ces oiseaux n'a la voix mélodieuse du rossignol ou de la fauvette. On n'entend partout que des cris aigus, lugubres et monotones. Les oiseaux les plus remarquables sont les paons, les cacatoès, les perroquets de toutes les couleurs. Il y a aussi un petit oiseau de la grosseur du pouce. Son plumage est charmant, il est moitié rouge, moitié blanc, avec quelques nuances de vert. C'est, si je ne me trompe, l'oiseau que les Européens appellent colibri. On trouve encore dans ces bois des coqs et des poules sauvages qui par le chant, la forme et le plumage, ressemblent parfaitement aux coqs domestiques, et on tend un filet tout auprès. Le coq sauvage accourt aussitôt pour se battre contre ce nouveau venu. Le chasseur qui s'est caché dans les broussailles tire le filet, et le coq est pris. J'ai vu des cygnes noirs, mais je ne crois pas qu'ils soient originaires de Siam. Parmi les oiseaux remarquables par leur grosseur, on distingue celui que les Siamois appellent Noc-Ariam (1) : lorsqu'il marche, sa tête s'élève au moins d'un pied et demi au-dessus d'un homme d'une taille ordinaire ; il est gros à proportion ; ses plumes sont d'un gris cendré, quelquefois il a le cou et le haut du dos rouges. Sa tête est aussi grosse que celle d'un homme. Son bec, qui a près de deux pieds de long, a la forme d'un cône. Il vole quelquefois si haut qu'il est impossible de le voir, mais son cri aigre et perçant annonce sa présence, lors même que la hauteur de son vol le dérobe à la vue ; cet oiseau ne se nourrit que de graines et d'herbes. Ses œufs sont semblables à ceux de l'autruche ; il est fort commun à Siam. Il vient quelquefois voler autour de notre séminaire.

J'ai vu un oiseau de proie appelé noccasoun (2), qui a un talent particulier pour pourvoir à ses besoins : lorsque sa chasse n'a pas été heureuse, il attaque le vautour, le prend à la gorge, et le force à partager avec lui la proie qu'il avait déjà dévorée. Ce singulier combat se renouvelle souvent à Bangkok, dans le lieu où l'on dépèce les morts. Je vous dirai plus bas ce que j'entends par dépecer les morts.

Les quadrupèdes les plus curieux qui peuplent les forêts de Siam sont :

Le singe. Il y en a de toutes les formes et de toutes les grandeurs, il y en a un qui a la facilité de se dresser sur ses pieds de derrière et de marcher à peu près comme un homme, mais il a les jarrets comme paralysés, en sorte qu'il traîne ses jambes et se relève difficilement lorsqu'il est tombé par terre. C'est probablement le singe que Buffon appelle Orang-Outang. En effet, les Malais appellent Orang-Outang les hommes qui habitent les bois (3).

Du côté du Tonkin on trouve, dit-on, un singe qui est fort dangereux ; s'il rencontre un homme au milieu des bois, il le prend par les bras, se met à rire de toutes ses forces pendant assez longtemps, et finit par étrangler l'infortuné voyageur. Quand on est obligé de traverser ces forêts, on prend avec soi deux morceaux de bambou (le bambou est une espèce de roseau très haut et très gros, il a des branches ; il est bon à manger quand il est tendre. Les Indiens font un grand usage du bambou ; leurs maisons, leurs meubles, leurs sièges sont de bambou ; ils en font des voiles, des boîtes, etc.). Quand le singe paraît, on met ses deux bras dans ces bambous. Le singe, à son ordinaire, saisit les bras du voyageur, ou plutôt le bambou qui les couvre ; celui-ci retire doucement ses bras sans que le singe s'en aperçoive et le perce d'un coup de poignard. La chose n'est pas difficile, parce que cet animal ferme les yeux quand il rit. Il y a ici une autre espèce de singe que l'on peut appeler cul-de-jatte. Il ne peut presque pas faire un pas, tant ses jambes sont faibles, mais ce défaut est éminemment compensé par la facilité qu'il a de sauter d'un arbre à un autre, et de se soutenir continuellement suspendu par les pattes de devant. Je crois en avoir vu un à Java.

Depuis quelques années, il a paru à Siam un animal entièrement inconnu autrefois ; c'est un quadrupède de la grosseur d'un taureau. Sa tête ressemble à celle du singe, il a une grosse et longue queue ; son cou et le haut des épaules sont rouges, le reste du corps est noir. Un de nos chrétiens en tua un il y a quelques années. Quand il paraît dans un endroit, tous les autres animaux féroces abandonnent le pays pendant tout le temps qu'il est dans le voisinage. Son cri, qui ressemble au rugissement du lion, fait trembler le tigre. On annonce qu'il vient d'en paraître un aux environs de Chantaburi. On croit que cet animal est originaire de la Chine (4).

On trouve encore dans ces bois la gazelle, le bouc et le taureau sauvages, le buffle, l'ours. Il y a deux espèces d'ours : celui de la première espèce ressemble à l'ours que l'on trouve en France, mais il est plus noir ; cet animal est timide, il fuit à la vue de l'homme. L'ours de la seconde espèce est très féroce ; il est de la grosseur d'un veau ; son poil est roussâtre. Voltaire ne voulait pas croire qu'il y eût des ours dans la Palestine (5) ; qu'aurait-il dit s'il en avait rencontré dans les forêts de Siam ? Fait-il moins chaud ici qu'à Jérusalem ?

Il y a aussi des sangliers, des rhinocéros et des licornes. Le rhinocéros est, après l'éléphant le plus gros et le plus fort de tous les quadrupèdes ; sa tête est semblable à celle du cochon : elle est armée de deux cornes, dont l'une est placée presque à l'extrémité de son nez ; il en a une beaucoup plus petite que l'autre. La licorne, s'il faut en juger par la tête que des chasseurs apportèrent à Penang il y a quelque temps, est beaucoup plus grosse qu'un bœuf (6). Elle diffère du rhinocéros par sa forme et par la manière dont sa corne est placée ; elle est sur le front et se dirige en haut. Cet animal court toujours en ligne droite, la raideur de son cou et de tout son corps ne lui permet guère de se tourner par côté, il peut même difficilement s'arrêter quand il a pris l'élan. Il renverse avec sa corne ou coupe avec les dents les arbres de médiocre grosseur qui gênent son passage. Ainsi, la licorne n'est pas un animal fabuleux, comme certains philosophes l'avaient insinué pour contredire l'Écriture sainte ; c'est un animal réel et d'une espèce différente de tous les autres. On compose d'excellents remèdes avec ses cornes, ses dents, son sang et son cœur, objets qui se vendent très cher.

De tous les quadrupèdes que l'on trouve dans ces bois, l'éléphant est sans contredit le plus curieux et le plus utile. Siam est la contrée des Indes qui en a le plus grand nombre. L'éléphant d'Asie est beaucoup plus gros et plus fort que celui d'Afrique ; il a depuis 9 jusqu'à 13 pieds de hauteur ; ses défenses ont ordinairement 5 pieds de long sur 15 pouces de circonférence. J'en ai mesuré qui avaient plus de 6 pieds en longueur ; elles sont creuses à leurs racines, et se terminent en pointe. C'est un animal très dangereux quand il erre seul au milieu du désert ; il fait cruellement mourir l'infortuné voyageur qu'il peut atteindre. Tantôt il l'élève en l'air avec sa trompe, le jette ensuite à terre avec violence et le perce avec ses dents, tantôt il l'écrase sous ses pieds ; quelquefois il creuse une fosse dans le sable et l'enterre tout vivant. Il n'est pas toujours sûr, pour éviter sa fureur, de grimper sur un arbre ; si l'arbre n'est pas trop gros, il l'abat. On dit que si l'arbre est trop gros, il appelle d'autres éléphants ; ceux-ci accourent à sa voix ; lorsqu'ils sont réunis en nombre suffisant, ils arrosent le pied de l'arbre, et à l'aide de leurs trompes, ils en arrachent les racines et le renversent.

Réduit à l'état de domesticité, l'éléphant ne ressemble plus à lui-même : il est doux, docile, intelligent, il obéit à la voix de son conducteur, il accourt quand il l'appelle, il lui donne avec sa trompe ce qu'il lui demande. Quand il est fatigué, il frappe la terre avec sa trompe et en tire un son semblable à celui du cor, pour avertir son cornac qu'il est enfin temps de prendre du repos. Nous en avons deux actuellement à Bangkok dont l'un va très souvent au bazar pour quêter du fruit ; quand il a rempli sa trompe, il s'en retourne et partage avec son conducteur le produit de sa quête. L'autre se place à la porte du palais du roi : on apporte un grand vase rempli de riz et une cuillère ; l'éléphant la prend avec sa trompe et donne du riz à tous les talapoins qui passent. On ne saurait concevoir jusqu'à quel point l'éléphant porte l'affection pour son maître, si l'on n'en avait des preuves incontestables. Lorsque son conducteur s'endort au milieu des bois, l'éléphant s'approche de lui pour le garder, il chasse les insectes qui pourraient l'incommoder ; s'il dort encore lorsqu'il est déjà nuit, il le place légèrement sur ses dents et l'apporte dans sa cabane. On m'a assuré qu'à l'approche d'un éléphant sauvage, il prend son conducteur qui est assis sur son cou, le ceint avec sa trompe, le place sous sa gueule et combat avec ses défenses. L'affection qu'il a pour son conducteur le porte à le mettre ainsi en sûreté avant d'attaquer son adversaire.

Dans les voyages, l'éléphant mange peu pendant le jour, mais il emploie toute la nuit à remplir son large estomac. Il se nourrit de foin, de feuilles d'arbres, de grains, de riz. Il aime beaucoup les cannes à sucre et surtout les liqueurs spiritueuses, mais il faut bien se garder de lui en faire boire ; il en faut très peu pour l'enivrer. Dans l'ivresse, il ne reconnaît plus de maître. Il dort peu, il se couche un peu par côté, à moins que son conducteur ne l'ait attaché par les deux pieds de derrière à un arbre. L'éléphant aime beaucoup l'eau, il se plaît dans les endroits marécageux, il marche volontiers par un temps pluvieux. Quand il trouve de l'eau, il s'arrose à l'aide de sa trompe. S'il n'en trouve pas, il en tire du fond de son estomac ; il jette de la terre par-dessus, et s'essuie lui-même avec un bouchon de foin ou avec une branche d'arbre qui lui sert en même temps d'émouchoir pour chasser les insectes qui l'incommodent. Il se couche ventre à terre pour recevoir sa charge ou le voyageur qui doit le monter, il en fait de même lorsqu'il rencontre des bourbiers profonds ; il se traîne sur le ventre et sur les genoux ; le poids de son corps se trouvant réparti sur une base plus large, il enfonce moins. S'il rencontre une rivière, il sonde d'abord avec sa trompe la profondeur de l'eau ; tant qu'il trouve du fond, il marche, quand il n'en trouve plus, il plonge et nage entre deux eaux. Il revient ensuite à la surface pour respirer, plonge encore, et ainsi de suite jusqu'à l'autre bord.

L'éléphant est la seule monture dont on puisse se servir dans de longs voyages. Au milieu d'un pays marécageux où l'on ne trouve ni chemin ni sentier, il faut avoir toujours la hache à la main pour s'ouvrir un passage. L'éléphant aide avec sa trompe et ses pieds, il abat ou il écarte les branches et les arbres de moyenne grosseur. On est obligé de temps en temps de pousser des cris pour se rallier ; le guide jette quelquefois de petites branches d'arbre sur la route qu'il a tenue, afin que ceux qui le suivent ne s'égarent pas ; enfin, il y a des endroits si couverts de broussailles qu'on est obligé d'y mettre le feu. Au lieu de selle, on attache sur le dos de l'éléphant un grand panier couvert, le voyageur se place dedans comme il peut. Il faut avoir soin de se couvrir la tête et le visage ; sans cette précaution, on courrait risque de la vie : le soleil brûle et déchire la peau jusqu'au sang.

L'éléphant est très fort, il porte sur son dos des pièces de canon, des hommes, etc. On peut le faire marcher plus de 24 heures quand on a soin de le faire bien manger. J'en montais un que l'on fit marcher pendant plus de cinquante heures. Il n'eut, dans cet espace de temps, que six heures pour manger et se reposer. J'avais pitié de cette pauvre bête, mais il n'était pas en mon pouvoir de lui procurer du soulagement.

Je suis persuadé que vous lirez avec plaisir ce que je vais vous rapporter de la manière de prendre et de dompter l'éléphant sauvage (7). Au mois de mars, on lâche dans les bois quelques éléphants femelles ; peu de temps après, on les rappelle avec une corne ; elles reviennent accompagnées d'un nombre considérable d'éléphants sauvages. On introduit les uns et les autres dans un parc environné de hautes palissades, et on ferme la porte sur eux. Des hommes placés sur une terrasse défendue, par devant, par de gros troncs d'arbres, lancent sur l'éléphant qu'ils veulent prendre un filet ou lacet, et le saisissent par le pied. Il n'est pas de tortures qu'ils ne lui fassent souffrir quand ils l'ont en leur pouvoir : ils l'élèvent en l'air à l'aide d'une machine, ils le frappent, lui mettent du feu sous le ventre, le font jeûner longtemps, ils le renversent avec violence, le percent avec un fer aigu, et le forcent enfin, par la violence des tourments, à recevoir un maître ; les éléphants domestiques aident à la manœuvre, ils entourent l'éléphant sauvage, le menacent et le forcent à marcher (8). C'est à quelque distance de Juthia que l'on prend le plus grand nombre d'éléphants.

Il est bien difficile de tuer cet animal avec une arme à feu ; la balle s'aplatit sur sa peau : il est cependant quelques parties du corps où il peut être blessé mortellement : tels sont les yeux, le sommet de la tête. Il en est de même du rhinocéros et de la licorne.

S'il est dangereux de rencontrer dans ces forêts quelqu'un des animaux dont je viens de parler, le danger est bien plus grand si l'on rencontre le tigre (9). C'est sans contredit le plus féroce de tous ces animaux. La rage et la fureur sont peintes dans ses yeux. Il égorge plutôt par plaisir que par besoin, il ne s'abreuve que de sang ; son audace égale sa cruauté. Il attaque l'éléphant avec avantage, il lui déchire la trompe, lui saute sur le dos et finit souvent par en faire sa proie. Quand l'éléphant voit venir le tigre, il met sa trompe dans sa bouche et lui présente ses défenses. Lorsque le tigre prévoit que la force ne lui réussira pas, il a recours à la ruse. Il est ingrat et insensible, on dirait même que les bons traitements l'irritent au lieu de l'apaiser. Celui qui le soigne est quelquefois la première victime de sa cruauté. Il est doué d'une vitesse et d'une agilité singulières. Le tigre ressemble au chat par la forme de son corps et par la manière dont il saisit et déchire sa proie. On distingue à Siam trois espèces de tigres : la plus grande espèce, que les habitants appellent sua-crong (10), est la plus dangereuse. Le tigre sua-crong est de la grosseur d'un veau ; sa peau est vergetée de rouge, de blanc, de jaune et de noir. Le tigre de la deuxième espèce s'appelle sua dau (11) : il est aussi haut qu'un gros dogue. Il n'ose pas attaquer l'homme en face, il ne peut soutenir son regard ; il attend le moment où il n'est pas aperçu. Sa peau est semée de petites touffes noires et jaunes mêlées d'un peu de blanc. La troisième espèce a la peau comme le chat gris, mais il est deux fois plus gros ; il fuit toujours à la vue de l'homme ; il se nourrit de poissons, d'oiseaux, de poules ; il rôde pendant la nuit autour des basses-cours, et fait main basse sur tout ce qu'il rencontre : c'est une espèce de regard ; les Siamois l'appellent sua pla (12). Les tigres grimpent sur les arbres qui sont un peu inclinés ; ils ne peuvent pas monter sur ceux qui sont droits. Croiriez-vous que l'on retrouve encore dans le tigre et l'éléphant un reste de l'empire que Dieu a donné autrefois à Adam sur tous les animaux ? Le tigre, comme je l'ai déjà dit, ne peut point soutenir le regard de l'homme, et lors même qu'il l'a égorgé, il lui arrache la peau du crâne et la fait tomber sur son visage pour s'épargner la vue d'un objet si effrayant pour lui. L'éléphant voit de même avec peine un homme placé directement devant lui, même à une certaine distance, et pour l'obliger à se ranger par côté, il tire de son estomac une gorgée d'eau dont il inonde le curieux indiscret. Quand il est sur le point de percer un homme avec ses dents, il ferme les yeux, ce qui quelquefois donne à celui-ci la facilité de se sauver.

Il y a beaucoup d'écureuils à Siam : il y en a un entre autres qui vole, si je puis m'exprimer ainsi, sans avoir des ailes. La peau qu'il a à côté des oreilles peut s'étendre beaucoup, ce qui lui donne la facilité de diminuer la pesanteur de son corps. Il vole en prenant son essor d'un arbre à l'autre, et se dirige en décrivant une ligne diagonale vers un autre arbre moins élevé.

Je ne veux point terminer l'article des quadrupèdes sans vous parler d'une espèce de rat qui est de la grosseur d'un chat ; quand il est apprivoisé, on s'en sert dans les maisons pour prendre les rats plus petits que lui et détruire les insectes (13). Le chat, qui n'a pas la réputation de vivre en fort bonne intelligence avec les rats, ne cherche pas dispute à celui-ci : il le respecte parce qu'il le craint. Quand nous passâmes à Kedah, le gouverneur fit présent d'un de ces rats à l'ambassadeur siamois, mais il donna deux éléphants à l'ambassadeur anglais.

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NOTES

1 - Nok krarian (นกกระเรียน), nom siamois de la grue antigone (Antigone antigone ou Sarus Crane), oiseau qui peut atteindre 1,80 mètre de hauteur.

Grue antigone Antigone antigone. 

2 - Nous n'avons pu identifier ce rapace. 

3 - Le mot viendrait du malais ōrăng-ūtăn, homo sylvaticus, homme des bois. Selon Yule et Burnell (Hobson Jobson, 1903, p. 643), c'est abusivement que les Occidentaux appellent ainsi ce primate. Ce nom n'a jamais été utilisé par les indigènes pour désigner un singe, mais uniquement des tribus sauvages. Dans toute la péninsule, ōrang-ūtan est le nom que l'on donne aux tribus sauvages (…) le mot ōrang étant réservé exclusivement à la description de l'espèce humaine.

Orang-Outang Femelle. Histoire naturelle de Cuvier - 1824. 

4 - Breazeale et Smithies suggèrent (op. cit., note 14, p. 80) qu'il pourrait s'agir d'un gaur (Bos gaurus), bovidé sauvage originaire du sud-est asiatique.

Gaur (Wikipédia). 

5 - Allusion à La Bible enfin expliquée par plusieurs aumôniers de S.M.L.R.D.P. [Sa Majesté le roi de Prusse] publié en 1770 : Il y a des naturalistes qui prétendent qu'on ne voit point d'ours dans les pays qui nourrissent des lions. Nous ne sommes pas assez instruits de cette particularité pour les réfuter ; l'histoire sacrée est plus croyable qu'eux. (Œuvres complètes de Voltaire, 1893, tome 31, note 2, p. 146). 

6 - Peu de gens croient encore à l'existence des licornes en 1829. Ambroise Paré avait mis leur existence en doute dès 1582, et dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert (1751, tome 9, p. 486), le baron d'Holbach la qualifiait d'animal fabuleux. Toutefois, l'animal aura encore des défenseurs jusqu'à la fin du XIXe siècle. On pouvait lire dans la Revue de l'Orient, bulletin de la Société orientale de 1845 (page 278) : M. Mac Carthy dit que l'existence de la licorne ne peut plus être mise en doute. Cet animal habite les contrées voisines de l'Himalaya. Le voyageur Prinsep a en vu de nombreuses dépouilles, dont quelques-unes étaient fraîches, déposées comme ex-voto par les chasseurs dans les temples situés sur cette haute chaîne de montagnes. C'est un animal solipède, mais dont la tête carrée armée d'une corne unique placée au milieu du front se rapproche plus de celle du taureau que de celle du cheval. Il est probable que Barthélemy Bruguière n'a pas vu la tête dont il parle, peut-être un rhinocéros à une seule corne. 

7 - La plupart des relations du XVIIe siècle (Chaumont, Tachard, La Loubère, Choisy, Marcel Leblanc, etc.) décrivent la manière de capturer les éléphants en des termes à peu près similaires à ceux de Bruguière.

ImageChasse pour prendre les éléphants. Dessin anonyme (1688).
ImageDétail du dessin Chasse pour prendre les éléphants.
ImageLa chasse des éléphants au Siam. Gravure 1727. 

8 - Cette méthode de dressage des éléphants appelée phachan (ผ่าจ้าน) est encore pratiquée de nos jours et régulièrement dénoncée par les associations pour la défense du bien-être animal. Les images difficilement soutenables circulant sur Internet rendre aujourd'hui l'opinion publique de plus en plus critique vis-à-vis de cette technique, millénaire sans doute, mais pour le moins barbare. 

9 - Buffon dénoncera l'abus de langage qui consistait à appeler indifféremment tigre tout animal dont le pelage était tacheté, moucheté ou tigré : MM. de l'Académie des sciences ont suivi le torrent, et ont aussi appelé tigres les animaux à peau tigrée qu'ils ont disséqués et qui sont cependant très différents du tigre. (Œuvres complètes, IX, 1884-1885, p.180). De fait, parmi les trois animaux mentionnés par Bruguière, seul le premier est vraiment un tigre. 

10 - Sua-krong (เสือโคร่ง). C'est le tigre du Bengale.

ImageSua krong : tigre du Bengale. 

11 - Sua-dao (เสือดาว). C'est le nom thaï du léopard.

ImageSua dao : léopard. 

12 - Sua-pla (เสือปลา) : c'est le nom siamois du chat pêcheur, aussi appelé chat viverrin.

ImageSua pla : chat pêcheur ou chat viverrin. 

13 - Peut-être une sorte d'herpestidé, famille à laquelle appartient la mangouste. Cet animal carnivore, réputé pour s'attaquer aux serpents, peut effectivement évoquer un gros rat. 

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Page mise à jour le
12 septembre 2019